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En parcourant un ancien numéro de la Revue de la Haute-Auvergne (T73, 2011, pp 437-438), je suis tombée sur un court article de Jean Le Guillou (1930-2011), vice-président de la Société « La Haute-Auvergne » de 1978 à 2010 intitulé L'énigmatique entaille de l'église d'Escorailles.

Escorailles eglise 4Escorailles, l'église Saint-Jean Baptiste et son petit portillon blanc à gauche

Cet article évoque la découverte fortuite par l'auteur d'une pierre gravée visible au ras du sol dans le mur sud de l'église de cette commune ce qui n'a pas manqué d'attiser ma curiosité. Je suis donc partie en repérage, appareil photo en main.

Sur place, en raison de la proximité immédiate des vestiges du château des Scorailles, on imagine aisément que l'église actuelle fut bâtie à l'emplacement de l'ancienne chapelle castrale dont certains éléments ont certainement été réemployés.

Il n'y a qu'un moyen de faire (presque) le tour de l'église Saint-Jean Baptiste d'Escorailles, il faut pousser le petit portillon blanc à gauche du portail et déambuler lentement à la recherche de la fameuse pierre.

Escorailles Façade sud2Mur sud de l'église avec, bien visible, au milieu la pierre sculptée, et, à droite, les pierres tombales e l'ancien cimetière

 

Rien sur le mur ouest, je passe le chevet, toujours rien, puis quelques pierres tombales verticales datant du XIXe siècle, toujours rien sur le débord du mur, je continue encore un mètre environ et là, je la vois, elle est là, au ras du sol du mur sud de l'église.

Je la photographie de face, de profil, de près, de plus loin, puis je fais un tour à l'intérieur de l'église qui, par chance, était ouverte. Le même jour, mes pas m'ont également conduite dans une autre commune, tout près de là, à Drignac où je voulais voir de près et photographier la fameuse croix de Saint-Babet puis je suis rentrée chez moi impatiente de voir ce que donnaient les photos du jour.

La pierre sculptée figure, en relief creux, un personnage au sexe indéterminé, à la tête ronde et disproportionnée par rapport au reste du corps dont on ne voit que le tronc, les bras et les mains qui semblent jointes sur le ventre, ainsi que le haut des cuisses, probablement écartées, le reste du corps est absent. Si ce n'était ces cuisses écartées, l'ensemble pourrait ressembler au revers de la croix de Saint-Babet visible tout près d'ici à Drignac.

Pierre graveePierre gravée en relief creux (Escorailles) St Babet 4Saint-Babet au revers de la croix de Drignac

Cette ressemblance n'est pas notée par Jean Le Guillou qui évoque, sans certitude, un élément pré-romain en raison de l'exhibitionnisme qu'inspire les cuisses écartées et des bouclettes qu'il croit distinguer sur la tête « disposées en vagues parallèles orientées vers l'arrière ».

Pour ma part, en prenant un peu de recul, le doute ne me paraît pas permis, cette pierre ressemble à un croix dont la partie terminale fut sans doute cassée juste sous les branches horizontales, il semble moins probable qu'elle soit sous terre. Si l'on y ajoute la ressemblance citée précédemment avec la croix de Saint-Babet de Drignac, on est vraisemblablement devant un cas de réemploi de croix de calvaire. Ces croix de calvaire, fréquemment installées dans les cimetières d'église, représentaient généralement le Christ en relief sur l'avers et au revers « soit la Vierge, soit le patron de l'église » (Abel Beaufrère, R.H.A., T. 49, 1983).

Les maçons de l'époque auront choisi d'orienter la croix côté revers, plat, plutôt que l'avers en relief, englouti de fait dans la maçonnerie. Pascale Moulier nous apprend que l'église d'Escorailles fut « dédiée jadis à Saint-Blaise, aujourd'hui  Saint-Jean-Baptiste » (Eglises romanes de Haute-Auvergne, TI, Editions CREER, p. 173). De là à imaginer que c'est Saint-Blaise, l'ancien patron d'Escorailles, qui dort ainsi au pied du mur de l'église, il n'y a peut-être qu'un pas ?

DTF, octobre 2021

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