Situé à Vezac, à 7 kilomètres d' Aurillac, le Château de Salles est un château de guet du XVe siècle qui jouit d'une vue exceptionnelle sur les monts du Cantal. Il possède un parc arboré de 8 hectares qui domine le golf de Vezac. Il s'agit désormais d'un hôtel-restaurant et d'un centre de formation culinaire.
Dans son Dictionnaire statistique du Département du Cantal, Jean-Baptiste de Ribier du Châtelet (1779 - 1844) évoque le château de Salles en ces termes :
"Sales, hameau et ancien château voisin du bourg, qui a longtemps appartenu à la famille de ce nom. Cette famille est originaire de l'Albigeois et possédait le château de Cordes , près de Gailhac. Bertrand de Sales, damoiseau, vivait en 1353 et était seigneur de Cordes. Aymar, son fils, damoisel de Cordes, vivait en sinhor en 1413. N. Jean de Sales épousa, en 1426, au château de Carlat, N. demoiselle Saure de Peyrusse, fille d'Antoine, capitaine du château de Carlat. Il fut lui-même capitaine du château de Muret. Son fils. Bonnet de Sales, s'établit à Vezac et devint la souche des seigneurs de Sales, en Auvergne. En 1468, Bonnet fut nommé capitaine du château de Muret par Jacques de Nemours, vicomte de Carlat, qui le fit aussi son échanson à la place de Jean, son père. Il fit construire le château de Vezac en 1476, et habitait alors celui de Polminhac. Ce château fut pris et rasé, en 1573, par M. de St-Herem, gouverneur du pays, parce que les huguenots en faisaient leur place forte. Après les guerres civiles, le château fut réparé ou plutôt réédifié. François de Sales, seigneur de Vezac en partie et de l'Ouradou, et appelé pour cela l'Ouradou, fut un vaillant capitaine. Chargé en 1589 de former une compagnie de cent arquebusiers, il était, en 1593, officier de la compagnie d'hommes d'armes de Charles de Valois. En 1602, Henri IV écrivit au capitaine l'Ouradou pour l'investir du commandement de la place de Carlat avec le Sr de Carlat; mais le Sr de Morèze, commandant en chef du château, étant devenu, sur de faux rapports, suspect au roi, Henri IV ordonna son arrestation, qui eut lieu à Aurillac, et commanda en même temps de livrer la place de Carlat à M. de Noailles. La dame de Morèze, ainsi que le capitaine l'Ouradou, Jean de Dienne, seigneur de la Planche, et vingt soldats de garnison entrés depuis peu, refusèrent de se rendre sans un ordre formel du roi. (Voy. l'article de Carlat. ) La reddition de la place n'eut lieu en effet qu'à la suite d'un traité qui emmena la délivrance de M. de Morèze.
Le capitaine de Sales et les autres officiers qui avaient désobéi aux ordres du gouverneur obtinrent leur pardon à cause de leur grande fidélité au roi.
François de Sales, seigneur de l'Ouradou et de Folholes, fit, en 1634, son hommage au roi. Il habitait le château du Doux. La famille de Sales s'est alliée avec celles de Tournemire, de Vinhals, de Fortet, de Cambefort, de Talon, de Sarret et de Capelle de Clavières, près d'Ayrens. En 1815, l'hérltière de cette famille, Jeanne-Gabrielle de Sales, épousa N. Charles de Polalion, baron de Glavenas, d'une ancienne maison du Velay, chevalier de la Légion-d'Honneur, officier au 4° régiment de chasseurs à cheval, et garde du corps du roi en 1814. Les seigneurs de Glavenas l'étaient aussi de Villars et de Bouzols, en Velay; mais ils tiraient leur origine du Gévaudan. N. François de Sales, frère de Mme de Glavenas, habitait Clavières; il est mort en 1858 sans postérité. Une branche de la famille de Sales s'était fixée à Capdenac, une autre au château des Cazeaux, près de St-Etienne-de-Carlat, une autre au Cambon, une quatrième a formé la famille d'Hautefort, qui possédait St-Chamand, en Limousin.
On voit, par ce qui vient d'être rapporté, que la terre et château de Sales ou de Vezac n'étaient plus dans la famille depuis longtemps. François de Sales en avait vendu une partie, en 1597, au sieur de l'Arbre; elle passa tout entière, à la fin du XVI° siècle, à la maison de Giou. En 1628, N. Jacques de Giou, seigneur do Caylus et de Sales, fut gouverneur pour le roi du château de Calvinet; il habitait le château de Sales."
La suite de l'histoire, si l'on peut dire, c'est le Chanoine E. Joubert qui nous la conte dans son ouvrage : Vieille maison vieux papiers de la vallée de la Cère (1965)
"Non loin du bourg de Vézac, sur une hauteur d’où l’on peut à loisir admirer la vallée de la Cère jusqu’à Polminhac et au-delà s’élève le beau manoir de Salles (certains écrivent Sales), tout chargé d’histoire. La famille qui le possédait en 1353 était albigeoise et tirait son origine de Cordes (Tarn). Un de ses membres devint seigneur de Muret (entre Vic sur Cère et Thiézac) et fit reconstruire en 1476 son château de Vézac.
Mais cent ans après, occupé par les Huguenots, il fut assiégé et détruit par M. de Saint-Hérem et ses troupes. Il fut reconstruit et habité à nouveau par la famille de Salles qui, dans la suite s’allia aux Clavières d’Ayrens.
En 1815, Jeanne-Gabrielle de Sales épousa le Baron de Glavenas. Pendant longtemps Salles a été habité par la sœur de Pierre Marty, décédée seulement il y a quelques années, léguant son château à l’Association Haüy pour le bien des Aveugles.Quelque temps après une vente dispersa les magnifiques objets d’art et d’ameublement accumulés dans le château. C’était en 1960. Des gravures, des tableaux, des porcelaines, des bijoux et des bronzes, des lustres, des sièges et meubles des XVIIème et XVIIIème siècles, des tapis d’Orient, furent la proie d’acquéreurs venus de la France entière. Ainsi se dispersent les plus belles choses. Récemment, je lisais l’annonce de la prochaine vente des autographes précieux collectionnés par Robert Schumann, « le Père de l’Europe » : des lettres de Descartes et de Pascal, des textes de Jean Racine …
Voilà le sort des collections privées …Très aimablement on me fait visiter le château. Il est resté assez de mobilier et de tableaux pour le meubler agréablement et pour en faire une très belle résidence. Immense salle à manger, vaste salon, chambres largement éclairées, hauts plafonds et voûtes harmonieuses, escaliers tournant en pierres de taille, boiseries sombres et cuivres rutilants, tout donne à cette demeure un noble cachet de distinction. Il était encore plus marqué avant 1901, où des réparations remplacèrent le toit à la Mansart par celui que nous voyons actuellement. Nous faisons encore un arrêt sur la terrasse. Devant nous s’étale le bourg de Vézac avec comme en toile de fond un bois épais de pins. A gauche la vallée de la Cère et le plateau du Coyan tout couvert de neige. Autour de nous épars sur la terrasse des chapiteaux romans. D’où proviennent-ils ? L’abbaye de Saint Géraud n’était pas loin. Jusqu’ici elle a pu semer des reliques … Et nous voici à nouveau emportés sur les ailes du passé."
De nos jours, après quelques vicissitudes, le château et ses annexes ont été rachetés par Christian Vebret, célèbre maître boulanger cantalien, fondateur de l'EFBPA (Ecole Française de Boulangerie et de Pâtisserie d'Aurillac). Grâce à un partenariat entre l'Institut Paul Bocuse (Lyon) et l'EFBPA, un nouveau CAP cuisine permet à des jeunes de plus de 18 ans de se former dans des laboratoires aménagés dans l'annexe du château, La Roseraie. Le château, quant à lui, poursuit son activité hôtelière sous la houlette de l'Aurillacoise Delphine Pichot.
Encore un château qui ne se visite pas mais dont l'avenir semble, pour l'instant, assuré. A défaut de visite, faites vous donc inviter au restaurant du château de Salles pour aller découvrir ces lieux dont l'origine remonte au XVe siècle.
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