Le domaine, comprenant le château et toutes ses dépendances bâties et non bâties, est classé au titre des Monuments HIstoriques depuis le 4 février 2004. En outre, le château d'Anjony solidement implanté au bout de l'unique rue de la commune de Tournemire bénéficie de deux étoiles dans le Guide Vert Michelin.
Habité par la même famille depuis l'origine (vers 1430) et ouvert au public depuis plus de 70 ans, c'est l'un des lieux incontournables du Cantal à associer à la visite du village de Tournemire, plus beau village de France. En plus de l'ouverture estivale, il est généralement ouvert les après-midi de la mi-février à la mi-novembre avec parfois une ouverture pendant les vacances de Noël.
Prosper Mérimée, inspecteur général des Monuments Historiques
Dans ses Notes d'un voyage en Auvergne (Calmann-Levy, 1838), Prosper Mérimée, alors en déplacement dans le cadre de ses fonctions d'inspecteur général des Monuments historiques, décrivait ainsi le château d'Anjony :
"Sur la Montagne de Tournemire, il existait autrefois, dit-on, cinq châteaux possédés par cinq seigneurs différents, et ces châteaux sont autant, sinon plus rapprochés que ceux de Chauvigny. Celui d'Anjony seul reste debout ... Il est situé sur une hauteur abrupte détachée de la chaîne du Cantal, sur une espèce de cap escarpé, séparant deux vallées profondes. On y monte par une pente fort raide qui serpente longtemps au milieu des rochers. Au sommet de la montagne est un plateau de forme triangulaire, et c'est à la pointe du triangle que s'élève le château d'Anjony. Son plan très régulier représente un petit carré flanqué à chaque angle d'une grosse tour ronde. Ses courtines sont très étroites et, de même que les tours couronnées de machicoulis... Deux grandes salles , l'une au dessus de l'autre, occupent le carré compris entre les courtines; dans trois tours il y a des chambres en communication avec ces grandes salles, la quatrième tour sert de cage à un escalier. Au rez-de-chaussée, dans l'intérieur d'une tour, est une petite chapelle, dont toutes les parois sont couvertes de fresques reprèsentant les différentes scènes de la Passion ... Tout l'édifice est fondé sur des caves profondes, qui s'étendent même sous un préau devant la porte d'entrée. Ces souterrains immenses servaient, je le suppose, de magasin à la garnison du château. Autant que j'ai pu en juger par le système général de la construction, par quelques ornements des voûtes, par l'appareil et le cournnement des murs, le château d'Anjony doit remonter au moins au XIVe siècle."
Une vendetta entre deux familles
Petit historique paru dans la Revue Massif Central :
"Guère plus qu'un donjon jeté comme un trait fin sur le ciel du Cantal, flanqué de quatre tours de gué, Anjony est un joyau, sans doute la plus remarquable des forteresses d'Auvergne, par la grandeur de son cadre, par la pureté de son architecture, par la richesse de son ornementation. Construit au XV° siècle, sur ordre royal par Loynot d'Anjony - un compagnon de Jeanne d'Arc, à dessein de protéger la vallée de la Doire, Anjony se pose dès cette époque en rival de Tournemire. Une sanglante vendetta va opposer les deux familles deux siècles durant, jusqu'à l'anéantissement des Tournemire dont le château sera finalement rayé de la carte. A l'inverse, le Donjon des Anjony prospère, s'enrichit d'une chapelle castrale aux fresques sublimes- La passion du christ en multiples tableaux magistraux- d'une salle des Preux aux murs peints de portraits en pied de Michel d'Anjony et de sa femme, germaine de Foix. Loyaux serviteurs du roi les Anjony - à l'origine une famille de pelletiers d'Aurillac se distinguent dans la carrière militaire. Ainsi l'increvable Claude qui sillonne les champs de bataille durant soixante deux ans, et qui adjoint au donjon une aile basse plus confortable. A l'âge de 89 ans, le valeureux guerrier, resté célibataire tente sans grand enthousiasme de prendre femme avant de léguer titre et château à son cousin Robert de Léoting en 1743. Depuis cette date les d'Anjony n'ont jamais déserté le donjon, cette fidélité étant le plus sûr garant de sa pérennité. Intact, solide, altier, le château semble défier le temps, comme une leçon d'histoire vivante."
La visite du château
De nos jours, il semble loin le temps où Prosper Mérimée gravissait péniblement la « pente fort raide qui serpente longtemps au milieu des rochers » pour accéder au château d’Anjony. Il suffit de garer son véhicule au parking située en contrebas du cimetière, de suivre la rue Edouard Marty, la rue principale de Tournemire, de passer devant la remarquable église romane Saint-Jean Baptiste pour découvrir le château. Le balisage mis en place permet d’accéder à l’entrée publique du château au pied des tours.
Dès la billetterie située dans l’ancienne cuisine, on est dans l’ambiance, un coup d’œil au plafond révèle la présence de nombreux crochets destinés à accueillir … les grosses pièces de salaisons et non pas à quelques tortures barbares comme le précise le guide.
N'oubliez pas de lire le paragraphe consacré à Jean Chanaux, truculent guide au château d'Anjony pendant plus d'un quart de siècle en bas de cette page.
Compte tenu du fait qu'il s'agit d'une propriété privée, les photos sont interdites sauf à partir des étages militaires.
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Niveau bas
Quelques marches permettent d’accéder à niveau bas du château, qui est en fait un donjon rectangulaire flanqué de quatre tours rondes. Cette étage était réservé à la vie de tous les jours, la cheminée est de taille imposante, agrémentée d’un système de surveillance de l’ennemi que le guide aura plaisir à vous révéler. Le bois est omniprésent, du parquet en chêne au plafond composé de poutres et caissons décorés, sans compter le mobilier, tables et meubles de rangement. A cet étage, la petite merveille est très probablement la petite vierge en majesté en bois sculpté du XVe siècle située dans la chapelle-tour.
Deuxième étage
Au deuxième étage se trouve la salle des preux ainsi nommée en raison de la décoration murale omniprésente mettant en scène la légende des neuf preux, très en vogue au Moyen-Age. En fait, il n’y en a que huit, à vous de découvrir qui manque à l’appel et pourquoi. Les portraits des hôtes du passé, Michel d'Anjony et Germaine de Foix, accueillent le visiteur de part et d’autre de la cheminée.
Troisième étage
Le troisième et dernier niveau du donjon change radicalement des deux précédents, les poutres du plafond ont cédé la place à deux clés de voûtes d’une hauteur impressionnante donnant un caractère quasi céleste aux lieux. Il n’était pas rare que justice y soit rendue mais ce ne devait pas être dans un silence religieux. En effet, en raison du chevillage en bois, le parquet grince de manière quasi insupportable et malgré les recommandations, nombre de visiteurs ne pourront s’empêcher de se déplacer pendant les explications du guide.
Fin de la visite
La visite se termine par les étages "militaires" même s'ils n'ont jamais occupé cette fonction. En effet, la construction "tardive" du château l'a tenu à l'abri des conflits, la Guerre de Cent Ans ayant pris fin en 1453. La présence d'une cheminée dans la salle de garde témoigne de l'attention portée aux soldats.
Le chemin de ronde, à presque 40 mètres de haut, offre quant à lui une vue à 360° sur la campagne environnante pour le plus grand bonheur des visiteurs.
Seule une partie du château ne se visite pas, sauf cas exceptionnels (Journées européennes du patrimoine par exemple), il s’agit de la partie rajoutée au milieu du XVIIIe siècle. Accolée au château, cette aile indépendante, d’un seul niveau surmonté d'importantes toitures de lauzes à deux niveaux de lucarnes, a été conçue pour répondre aux besoins de confort de l’époque. Elle constitue, aujourd’hui encore, l’habitation de la famille Léotoing de Tournemire.
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Jean Chanaux, truculent guide au château d'Anjony pendant plus d'un quart de siècle
Après plus d'un quart de siècle de visites guidées, et très personnellement commentées, Jean Chanaux, guide exceptionnel du château d’Anjony à Tournemire, a passé la main, 2018 a été sa dernière saison d'activité.
C’est en répondant à une annonce publiée par le propriétaire des lieux, Monsieur le Marquis Henri de Léotoing d'Anjony que cet ancien commerçant s'est découvert une vocation tardive qui l’a conduit à gravir quatre fois par jour, du 15 février au 15 novembre, les 150 marches de la forteresse dont il connaissait le moindre recoin et une multitudes d’anecdotes … souvent véridiques, tiroirs secrets, procès, vendettas, rixes et coups pendables, tout y passait. Le personnage, qui avait toujours une plaisanterie en réserve pour stimuler l’attention de son auditoire, se découvrait en même temps que les grandes salles qui courent du 1er au 3e étage. Si le téléphone sonnait pendant la visite, "c'est Jeanne d'Arc qui vous envoie des voix !" s’exclamait-t-il.
Vous l’aurez compris, Jean Chanaux n’avait pas son pareil pour faire revivre avec verve le passé des habitants du château d’Anjony pour le plus grand plaisir d’un public habitué à des visites moins … stimulantes. Facétieux, il n’hésitait pas à raconter qu’une année il avait reçu le secrétaire d'Etat au Tourisme lequel avait eu droit à la même visite !
Même si une page du château d’Anjony s'est fermée avec le départ de Jean Chanaux, le château se visite toujours avec un(e) guide tout aussi érudit(e) que son truculent précécesseur.
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