Traducteur, critique littéraire, moraliste et poète français. Camille Gandilhon Gens d’Armes a laissé des recueils de poèmes tels que Poèmes Arvernes publiés en deux tomes en 1927 et 1932, primés par l’Académie des Jeux floraux de Toulouse et couronnés du Grand Prix de poésie Fabien Artigue.
Sa famille portait le surnom de "Gens d’Armes" au moins depuis le XVIIe siècle. Si ses origines sont indéniablement paysannes, il tient de son père, autodidacte qui appréciait la littérature, le goût pour les classiques. Il découvrira l’imposante bibliothèque familiale (plus de 500 volumes) lors des longues soirées d’hiver mais aussi pendant ses longues journées de jeune berger.
Les années d'étude
Après Lavigerie, il poursuit ses études à Murat, puis au petit séminaire de Saint-Flour avant d’intégrer le célèbre lycée Henri IV à Paris où il reçoit l’enseignement d’Henri Bergson. Ses congénères s’appellent Alfred Jarry ou encore Charles Péguy, avec eux il fréquente les cafés littéraires du Quartier Latin. S’il est avéré qu’il rencontre Paul Fort, Léon-Paul Fargues ou Apollinaire, adeptes du symbolisme, il préfére la compagnie des poètes du Parnasse, Leconte de Lisle ou Théodore de Banville furent ses maîtres parmi d’autres.
Une bourse lui permet de poursuivre ses études supérieures à Clermont-Ferrand puis à Bordeaux, Paris et Berlin jusqu'à la mort de son père (1898). Pour subvenir à ses besoins, il enseigne l’anglais et l’allemand à l’Ecole Supérieure de Commerce de Paris, puis il travaille à l’agence Reuters à Londres. Il écrit ses premiers sonnets en Angleterre, Au Puy Mary et La Santoire.
De nombreux métiers pour gagner sa vie
En 1902, il devient rédacteur à la Préfecture de la Seine, en 1905, il se marie avec Jeanne Mathieu avec qui il aura quatre enfants.
Conteur et orateur de grand talent, il connaissait la langue d’Oc qu’il avait appris enfant. Il publie des études régionalistes et des poésies dans la Veillée d’Auvergne et y lance un appel pour la création d’une maintenance félibréenne d’Auvergne.
De 1909 à 1914, il fait partie du cercle Les Loups, avec d’autres idéalistes il donne des conférences littéraires au célèbre Café Procope. C’est au cours d’une soirée mémorable, le 15 juin 1912, présidée par Paul Doumer, compatriote de Gandilhon et, à cette époque, sénateur de Corse (!) que Paul Fort fut élevé au rang de « prince des poètes ».
Après avoir été interprète militaire pendant la première guerre mondiale, il exerce le métier de traducteur, il est également l’interprète officiel du Conseil de Paris jusqu’en 1936, date de son départ à la retraite.
Camille Gandilhon Gens d'Armes fait partie des jeunes Auvergnats séduits par La Bourrée, filiale de L’Auvergnat de Paris, fondée en 1925 par le compositeur Joseph Cantaloube. Ensemble, ils parviennent à sauvegarder de nombreux chants du folklore auvergnat. Canteloube met en musique le poème de Camille Gandilhon Gens d’Armes, Le chant des Auvergnats.
Souvenir de la visite de Gandilhon Gens d'Armes et Canteloube au château de Pesteils
Parallèlement, de 1918 à 1939, il publie de très nombreuses chroniques littéraires régionales pour L’Auvergnat de Paris. Il soutient Henri Pourrat, Raymond Cortat, Marie-Aimée Méraville et même Alexandre Vialatte rencontrés lors de ses nombreux séjours en Auvergne.
Retour au pays natal à la retraite
Il a aussi longtemps habité au hameau de Vercueyres à Laroquevieille (Cantal) dans la vallée de l'Authre où il cultivait son jardin, préoccupé, voire miné par la situation politique. Une habitante du village se souvient :« Il portait une petite barbichette, un chapeau et marchait d'un pas sûr et d'une démarche impérieuse ».
Il décède à Bordeaux le 22 juillet 1948 des suites d’une intervention chirurgicale. Il est enterré dans le cimetière de Lavigerie. Une plaque sur sa tombe rapporte ses derniers mots : "Mes chers enfants quand je mourrai ramenez-moi où sont morts tous les miens , là haut sur la montagne. Je veux mon humble église et l’agreste horizon où ma race a suivi la marche des saisons ».
Le fond Gandilhon Gens d’Armes est déposé au Musée de Haute-Auvergne de Saint-Flour où son buste, œuvre du sculpteur Jean-Marie Camus, est installé rue Marchande, tout près de la cathédrale.
De son vivant, et longtemps après sa mort, l’œuvre de Camille Gandilhon Gens d’Armes a souvent été critiquée, voire moquée ce dont il semblait se moquer lui-même. Il appartient peut-être à tout un chacun de se faire sa propre idée en le lisant.
Au Cantal (Extrait de Poèmes Arvernes)
Ancêtre fabuleux du monde occidental,
Volcan, premier surgi des gouffres atlantiques,
Ridé d’âpres torrents, noir de forêts antiques,
O notre père à nous, Auvergnats, ô Cantal,
Notre cœur est à toi, soit que l’hiver brutal
Cingle tes mornes flancs de neiges frénétiques,
Soit qu’au roc éternel de tes puys basaltiques
Déferle, à flots vermeils, l’océan végétal.
Jeunes, nous descendons vers les hasards des plaines,
Pour vaquer d’un cœur dur aux longs travaux humains.
Puis, quand nous sommes las d’errer par les chemins,
Heureux ou résignés, les mains vides ou pleines,
Vers toi nous revenons, terre où nous sommes nés,
Et tu reprends les os que tu nous as donnés
La colère du volcan (Légendes des Monts et des hommes, 1932) :
Flamme et ténèbre, issant des fonds océaniques
Le volcan dont la cendre a formé le Cantal
A décocher des blocs de soufre et de métal
Aux astres s’épuisait en efforts titaniques.
ou encore, à propos du cimetière de son petit village dans Fresques et Médaillons, 1955 :
Il fait si doux, ce soir ! Le langoureux été
Caresse de fraîcheur les prés et les bruyères.
Pâle, sur les monts bleux, voici le cimetière,
Vivant fouillis de fleurs par des ailes hanté.
Rien que des fleurs. Pas une tombe … En vérité,
C’est un jardin sauvage. Et si la croix de pierre
Accueillit, à l’aurore, une femme en prière,
Tout le jour les oiseaux sur cet arbres ont chanté.
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