Le moulin de Celoux, unique moulin à vent du Cantal, se situe à 1100 m d’altitude et offre un magnifique point de vue sur les monts du Cantal et la Margeride. A l'abandon depuis plus d'un siècle, il fut restauré à l'identique en 1993 sous l'impulsion de Marc Petitjean, maire de Celoux. La coiffe fut posée le 2 août 1994 et le 17 novembre de la même année, les pales du moulin reprirent leur rotation dans le sens inverse aux aiguilles d'une montre le temps de broyer quelques grains.
Le moulin à vent, un moulin de secours.
Les moulins à vent firent leur apparition en France, et dans le reste de l'Europe, vers le XIIe siècle. Si on en dénombrait 100 000 pour 30 millions d'habitants dans la France du XIXe siècle, ils étaient cependant rares en Auvergne, pays d'altitude, en raison de l'imprévisibilité des vents, violents et changeants. Ils se développent cependant en Margeride à la limite du Cantal et de la Haute-Loire concomitamment à l'essor démographique. De la fin du XVIIIe siècle au début du XXe, on en dénombrera une trentaine en fonctionnement en raison de la culture céréalière fréquente dans les vallées de la Haute-Loire. Aux alentours du Celoux, la majorité de ces moulins à vent appartenaient à des agriculteurs possédant déjà un moulin à eau dont le débit d'eau était fortement réduit en période de sècheresse.
Cependant l'industrialisation urbaine et le développement du rail, puis l'exode rural de l'entre-deux guerres, sonneront le glas des moulins à vent de proximité jusqu'à leur abandon total.
Vie et mort du moulin de Celoux
Il faut savoir que construire un moulin coûtait fort cher mais permettait de prélever des taxes, c'était donc souvent l'apanage des notables. Celui de Celoux fut érigé en 1807 au lieu-dit Puy de la Garde par Jacques Cathelat (1769-1847), laboureur-meunier issu d'une famille de notables aux fonctions aussi diverses que curés, notaires, juges de paix, greffiers, avocats, marchands et, en même temps, propriétaires terriens, laboureurs et meuniers. Ce Jacques Cathelat était déjà propriétaire et exploitant du moulin à eau de Sarde sur le ruisseau des Coffres (commune de Rageade) situé à 400 mètres sous celui de Celoux.
Des documents cadastraux nous apprennent qu'à la fin du XIXe, le moulin à vent de Celoux était déclaré « en ruine », peut-être pour éviter le paiement des impôts.
Néanmoins le toit fut restauré par la famille Cathelat aux alentours de 1917-1918. avant d'être définitivement abandonné, la tour s'effondra partiellement tandis qu'un arbre poussait en son centre.
Description et caractéristiques du moulin de Celoux
De forme cylindrique, la tour du moulin est constituée d'un épais mur en mortier de terre glaise, il mesure 5,50 mètres de haut pour un diamètre de 5,80 mètres à la base. La chèvre - la barre oblique qui va jusqu'au sol - fait tourner le toit généralement couvert de bardeaux ou de chaume sur une glissière de bois afin d'orienter les ailes pour une meilleure prise au vent.
Au rez-de-chaussée, on voit le blutoir(1), une cheminée, un mobilier rudimentaire (armoire et lit-caisse) et un escalier qui monte à l'étage où se trouvent la trémie et les meules.
Le mécanisme est particulièrement élaboré, du bon fonctionnement de chaque pièce dépend celui du moulin et le changement de certaines telles que les alluchons nécessite un réel savoir-faire. Si vous souhaitez être incollable sur le sujet, nous vous invitons à consulter cette page consacrée au mécanisme en meulerie.
Un frein de bois entoure la roue motrice, il est réglé à l'aide d'un cliquet pour ralentir le mouvement, et l'arrêter, si nécessaire.
Le chapiteau repose sur le sommet de la tour. Les engrenages sont en cormier et cerisier. La charpente est en chêne. La couverture est en pin. Le tout est entièrement chevillé à la main et a nécessité plus de 3 500 heures de travail lors de la restauration.
L'ensemble mobile, c'est-à-dire la toiture, la charpente et l'arbre moteur, est conçu de telle sorte que le toit puisse tourner afin que les ailes soient orientables face au vent pour le marin. La technique permettant la rotation est la suivante :
- la charpente conique du toit est composée de chevrons fixés sur une couronne de base, dite sablière tournante ou chemin tournant,
- les extrémités des grosses poutres formant une sorte de grille et soutenant l'arbre moteur, reposent de même sur la sablière tournante,
- cette sablière glisse sur une autre sablière dite dormante car elle se trouve solidement chevillé à une semelle de bois immobile couronnant le sommet de la tour. Ces sablières sont aussi désignées sous le terme de courbants, car elles se composent de plusieurs courbes de bois assemblées. A Celoux, les courbants sont en cormier, bois ayant la capacité d'absorber et de rétracter la graisse ; ce qui explique qu'une vieille tranche de lard pendait au plafond des moulins !
Le sommet du moulin est constitué d'un poinçon en forme de col. La base du poinçon recouvre largement le haut de la toiture afin d'en assurer l'étanchéité. Sur le poinçon se dresse une girouette représentant …
Les ailes de Celoux
L'originalité du moulin de Celoux réside dans ses ailes ; en effet contrairement à l'usage courant, celles-ci sont recouvertes de pales en pin et non pas de toile. Ainsi les quatre ailerons comprennent six plantes d'une envergures de 12 mètres pour une surface totale des deux ailes de 32 m2. On a calculé qu'en vitesse de croisière, les extrémités des ailes tournent à plus de 110 kilomètres/heure, soit 13 à 14 tours/minute.
Quant à la hauteur des ailes, elle s'évalue en fonction de quelques vieux dictons populaires : « la poule du meunier doit pouvoir passer sans danger sous las ailes du moulin en marche mais pas le chien du meunier » et dans les régions où les moulins sont plus élevés, « le chien du meunier peut passer sous les ailes mais pas l'âne du meunier » !
La montée du grain au moulin de Celoux
Selon la tradition orale, il était d'usage que les meuniers aillent chercher le grain destiné à être moulu à domicile et y rapportent la farine au moyen d'un attelage tiré par un couple de bovins ou une jument. Leur salaire – en fait le droit de mouture - consistait en un prélèvement d'une part variable mais généralement estimée à 1/20e de la quantité de grains convertis en farine.
La farine issue du moulin était souvent passée dans un tamis à la main, sans doute pour en affiner la mouture.
Pour conclure, Celoux, à l'extrême est du département, c'est une partie du Cantal oubliée et injustement négligée. Pour s'y rendre, il faut traverser l'A75 puis emprunter l'étroite et pittoresque D123. Une fois à Celoux, il n'y a plus qu'à suivre les panneaux "moulin à vent". Le chemin de terre qui y mène est parfaitement carrossable. Le site est magnifique, bancs, tables de pique-nique et aire de jeux pour les enfants n'attendent que vous. Ici les paysages s'étendent à perte de vue ... émaillés néanmoins par les (trop) nombreuses éoliennes qui ont "remplacé" les moulins qu'ils soient à eau ou à vent.
(1) blutoir : dispositif mécanique permettant de séparer la farine des autres composants du grain
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