Géraud, Calixte, Jean-Baptiste, Arsène Lacarrière-Latour est né le 13 octobre 1778 au 14 rue de la Bride à Aurillac (Cantal). Des problèmes de santé, intestinaux, le poursuivront toute sa vie. Le VI pluviôse An VI (25 janvier 1798), il épouse, à Ayrens, Marie-Anne Caroline de Montal.
Il semble que c'est à partir de son mariage qu'il prend le nom d'Arsène Lacarrière-Latour. De ce mariage naissent deux enfants, Emile en 1799 et Coraline en 1800. Le jeune père de famille se retrouve seul, à Paris, vers 1802, où il suit les cours des Beaux-Arts, ses conditions de vie sont précaires au point qu'il a du mal à payer le loyer de la modeste chambre qu'il occupe rue Mazarine. S'il correspond régulièrement avec sa famille, en particulier avec son père, les liens avec son épouse restée dans le Cantal avec leurs deux enfants sont réduits au strict minimum.
De son enfance, Lacarrière-Latour a conservé des souvenirs très forts, en particulier celui de la venue du marquis de Lafayette à Aurillac le 1er septembre 1787. En l'honneur de la visite du "héros citoyen", ami de Washington, son père, alors lieutenant général, avait ordonnait qu'à cette occasion toutes les boutiques de la cité géraldienne soient fermées. Le récit des faits d'armes de Lafayette a enflammé l'imagination du jeune Arsène.
A la fin de ses études, début septembre 1802, il embarque au Havre pour tenter de régler des problèmes d’héritage de la famille de son épouse, héritière de Jean Pradhenes, riche planteur à Saint-Domingue. Sur place, tout n'est que chaos, épidémies, massacres, viols et tortures de noirs. Arsène est mobilisé en tant qu'ingénieur militaire. Après quelques mois, devant l'échec de la mission qu'il s'était fixée, il décide de partir ... en Amériqueoù il arrive au début de 1804 après un séjour à Cuba. Deux ans plus tard il est en en Louisiane. C'est ici, en bordure du Mississipi, près du vieux fort de Bâton-Rouge (nom d'un chef indien) que sa carrière d'architecte-urbaniste prend tout son sens, Progressivement Bâton-Rouge, future capitale de la Louisiane, sort de terre, entre 1806 et 1810, avec ses grands boulevards, sa grande place, ses habitations et ses jardins. Aujourd'hui, ce patrimoine urbain et architectural exceptionnel a été inscrit au registre des sites historiques américains sous le nom de Beauregard Town, du nom du propriétaire des terrains sur lesquels Lacarrière-Latour érigea la ville, Elie Toutant Beauregard (1759 - 1809), planteur français installé sur les rives du Mississipi.
Architecte important à La Nouvelle-Orléans (Louisiane), il se lie avec Edward Livingston, homme politique américain, qui signa à Paris le traité de cession de la Louisiane. En 1812, il devient citoyen américain, il n'envisage pas pour autant de faire venir sa famille dans le Cantal. La deuxième guerre d'indépendance débute la même année, les affaires de Lacarriière-Lacour périclitent jusqu' à la faillite. Il participe à la seconde guerre d’indépendance des Etats-Unis d'Amérique avec le titre d'ingénieur principal du 7e district. La qualité des défenses dont il entoure la ville en sa qualité d'ingénieur principal du général Andrew Jackson sauve La Nouvelle-Orléans des attaques anglaises. Il devient le Major Latour. Dans la foulée, il publiera ses mémoires de guerre à Philadelphie en 1816, il y rend un vibrant hommage au général Andrew Jackson, futur président des Etats-Unis d'Amérique.
Outre le corsaire Jean Lafitte et son frère avec lesquels il se livra à diverses missions de renseignements, Arsène Lacarrière-Latour rencontra trois présidents américains, James Madison (175 -1836), James Monroe (1758-1831) et Andrew Jackson (1765-1845).
Après des voyages au Texas, au nord du Mexique et à Cuba (1818-1834) où il est à la fois mystérieux conseiller des autorités espagnoles et architecte - il construit un quartier de La Havane (pont, aqueduc, viabilisation des rues et introduction de la machine à vapeur) - il rentre en France et voyage alors alternant les séjours entre l'Auvergne et Paris.
Près de trente ans après, Lacarrière-Latour rentre au pays, aussi peu fortuné qu'à son départ. Son épouse est décédée en 1825, il renoue avec ses enfants Coraline et Emile. Son état de santé empire, douleurs gastriques et diarrhées ne lui laissent guère de répit. C'est une sévère épidémie de grippe qui sévissait alors dans le Cantal, qui l'emporte le 21 mars 1837, dans la maison de sa tante, Marguerite Daudin, à la Combaldie, hameau de Saint Mamet La Salvetat. Il avait 59 ans. La rue principale de la commune porte son nom.
Le nom d'Arsène Lacarrière-Latour est cité dans de très nombreux ouvrages d'histoire américaine ; il est également gravé sur un petit monument édifié à Bâton-Rouge sur les bords du Mississipi, et bien sûr au musée de la Nouvelle-Orléans. Jean Garrigoux (Aurillac,1928 - Suresnes, 2017) qui s'est intéressé à lui de près, a écrit une imposante biographie* en 1997, biographie traduite en 2017 par Gordon S. Brown, diplomate à la retraite, et publiée par l’Université de Louisiane aux Editions Lafayette press.
Danièl Brugès consacre une vingtaine de pages à Lacarrière-Latour, La vie mouvementée d'Arsène Lacarrière-Latour dans Les mystères du Cantal paru aux Editions De Borée en 2010 (pp. 295-307). L'ouvrage a été réédité en mars 2021.
* Garrigoux, J. 1998. Un aventurier visionnaire, l'étrange parcours d'un Français aux Amériques, Mémoires de la Société "La Haute-Auvergne" - 4. Aurillac
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