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Roffiac. — La commune de Roffiac dépend du canton nord et de l'arrondissement de St-Flour. Sa forme est allongée de l'est à l'ouest. Elle est bornée au nord par les communes de Coltines et d'Andelat; au sud, par celles de St-Flour et de Tanavelle; a l'est, encore par celle d'Andelat, et à l'ouest par celles d'Ussel, de Valuéjols et de Tanavelle.

La superficie de son territoire est de 2,050 hectares, dont 1,250 h. en terres labourables; 600 h. en prairies et pacages; 50 h. en bois taillis, et 150 h. en terres vaines, bruyères et rochers.

Elle est arrosée par la rivière d'Ander, qui la traverse de l'ouest à l'est; les ruisseaux d'Auzel, de Mazérat, de Liauzargues et de Vedernat.

La population de cette commune est de 153 habitants, répartis dans 6 villages, 5 hameaux et 195 maisons.

Roffiac, le chef-lieu, à 5 kil. de St-Flour, est un gros village bien bâti situé sur la rivière d'Ander, qui le longe en partie. On la traversait sur un pont dont la construction primitive remontait à une haute antiquité. La culée, sur la rive gauche, était appuyée au mur d'enceinte du château qui en commandait le passage. Ce pont, sur une petite rivière qui devenait un torrent furieux lors de la fonte des neiges, avait été primitivement voûté. Emporté par les eaux, il fut refait en 1549; mais un tablier en bois succéda à la voûte. Le seigneur avait proposé de le reconstruire a ses frais moyennant un droit de péage; mais la prévôté de St-Flour préféra imposer une contribution sur son ressort pour sa reconstruction. Il avait deux arches, 64 mètres de longueur et 3 mètres de largeur. Comme les piles restaient intactes et que le tablier seul était enlevé, cette restauration fut évaluée a 7,500 livres. Ce pont fut refait de nouveau en 1670.

Lorsque la route impériale de St-Flour à Aurillac fut construite, elle dut passer sur ce pont, malgré son peu de largeur et de solidité qui le rendaient incommode et dangereux; mais une crue d'eau considérable ayant été la conséquence de la fonte des neiges dé l'année 1822, l'Administration des ponts et chaussées jugea plus utile de refaire le pont de Roffiac dans de nouvelles conditions. On l'établit à quelques centaines de mètres plus bas. Sa construction fut faite en belles pierres de taille , et aujourd'hui c'est un des ponts les plus élégants et les plus solides de cette route.

L'église de Roffiac servait jadis de chapelle au château ; elle était comprise dans son enceinte, et on communiquait avec lui par un mur crénelé. Elle est sous l'invocation de saint Gai, et dénote une haute antiquité. Son architecture est entièrement conforme à celle de la chapelle que l'on voit au Puy, au pied du rocher de St-Michel, et que l'on croit avoir été un temple des faux dieux. Quoi qu'il en soit de son origine, ce qui est certain, c'est qu'elle porte le type du style roman pur de la Haute-Auvergne, marqué par son clocher à peigne, et tout son ensemble sans mélange ni altération. Suivant Dulaure, elle fut donnée au xe siècle à Hugues, abbé de Conques, par Etienne III, évêque de Clermont, relui qui fit réédifier la ville de Clermont, ravagée par les Normands sous Louis-Ie-Débonnaire.

Aldeberte , dame de Roffiac, fonda en 1235, au prix de 230 cous d'or, una vicairie dans l'église de Roffiac qui fut réunie, à la fin du XII° siècle , à la même épiscopale de Clermont. Elle dépendit plus tard de l'église collégiale de St-Flour, et le chapitre en pril possession en 1353. Quant au prieuré, il fut uni à la cathédrale de St-Flour en 1348, et cette union confirmée en 1330.

Ont été prieurs de Roffiac : Guillaume de Benoit, en 1454; Antoine Dumas, en 1303; Durand de Bai sac, en 1649; Christophe d'Azat, en 1674 ; Jean Brassac, on 1677; N. Rongier, en 1741 ; N. Rongier, en 1791.

Les ouvertures que l'on a dû faire au travers de plusieurs bâtiments pour relier le pont neuf avec la route impériale, ont dégagé l'église. Elle est aujourd'hui en partie isolée, ct son architecture en relief. Depuis la destruction du corps de logis du château sur lequel elle était appuyée, on a ouvert au pignon nord une porte d'entrée au-dessus de laquelle est un œil-de-bœuf en rapport avec le style de l'édifice. Les réparations faites dans l'intérieur témoignent du zèle et de l'entente des curés. Dans la coupole du chœur a été peint un ciel étoile d'un bel effet. On distingue enfin dans ce monument des modillons très-variés, qui accusent un ciseau habile pour l'époque.

On voit en outre dans l'église un beau vitrail de M. Thibaud, qui représente son patron, de demi-grandeur. Il s'y trouve aussi trois vitraux de grandeur it peu près naturelle, peints par M. Thévenot. Enfin, cet édifice ne laisse rien à désirer sous le double rapport de la propreté et des dorures.

Il se trouvait à Roffîac deux châteaux contigus, désignés sous le nom de supérieur et d'inférieur. Ils étaient donc distincts; ce qui résulte d'un hommage rendu, en 1300, à Charles de Joyeuse, évéque de St-Flour, par Guy de Jouvenroux, seigneur de la Trémolière, pour le château de Roffiac, vulgairement appelé le Chaslet-Soutio. Il avait anciennement le titre de Chastel souverain, à cause de sa magnificence. L'official de Clermont y tint son siège en 1305. M. Déribier dit que les comtes d'Auvergne ont rendu anciennement foi et hommage aux évêques de Clermont pour le château de Roffiac.

Roffiac avait donné son nom à une ancienne famille de chevalerie. Géraud Roffiac vivait en 1059; il était considéré comme le protecteur de l'église de Tanavelle, donnée à l'abbaye de Conques. Géraud donna, en 1073. au monastère de St-Flour le lieu de Montjourdes (Montagadet), pour y bâtir l'église et le prieuré de St-Michel. Raymond fut abbé de Moissac en 1214. Raynaud, son père, soumit son château aux abbés de Claux et de Moissac la même année.

Guillaume de Roffiac rendit hommage, en 1223, à l'évêque de Clermont, pour son château et celui de Tanavelle; Raymond, qui vivait en 1370, fut le dernier seigneur de cette époque jouissant de l'entière propriété de Roffiac; car ce fut après lui, et vers le commencement du XV° siècle, que cette terre fut divisée en plusieurs coseigneuries Etienne Gobet, damoiseau, chancelier pour le duc de Bourbon et pour l'évéque de Clermont, était coseigneur de Roffiac en 1428, et l'était encore en 1412. Aldeberte, dame du château supérieur de Rofliac, fit son neveu, Valzargues, son héritier. Noble Henri Rochette jouit, conjointement avec N. Guillaume de la Volpilière, en 1453, de la terre de Roffiac. Ce dernier lui acheta ses droits. Jean David, damoiseau, fut coseigneur de Roffiac en 1461, conjointement avec Annet de la Volpilière N. de la Baisse et de Chalusset en était aussi coseigneur en 1480. Jacques de la Volpilière vendit, en 1498, la seigneurie de Roffiac et les deux châteaux tels qu'ils existaient alors, à Guy de Jouvenroux, de St-Flour, seigneur de la Trémolière. Peu de temps après, autre Jacques de la Volpilière, son frère, à la téte de vingt hommes, vint s'emparer du château de Roffiac et s'opposa à la vente. Cette affaire fut portée au criminel à Aurillac, et la Volpilière condamné. La vente fut ratifiée l'année suivante, 1499, par Agnès de la Volpilière, sa fille, devenue dame de Roffiac, en son entier, par suite d!i décès de son unique frère.

La seigneurie de Roffiac ne resta pas longtemps dans la maison de Jouvenroux. Raymond, qui avait épousé, en 1535 Delphine Duprat, nièce de l'évéque de Clermont, en avait eu un fils et une fille, Catherine, laquelle épousa, en 1564, Jacques de Méallet de Fargues, qui, après la mort de son beau-frère, décédé sans enfants, devint seigneur de Roffiac. Cette seigneurie est restée dans sa famille jusqu'en 1790. Nous nous occuperons de la famille de Fargues à l'article Vitrac.

En 1281, Pierre de Viellevie, bailli des montagnes, déclara que quoique il eût arrêté des criminels dans le château de Roffiac, il n'entendait pas préjudicier aux droits du seigneur de Roffiac, ni à ceux du monastère de St-Flour, duquel relevait en fief ce château.

Le château de Roffiac, en 1574, se composait de trois corps de logis, ayant au milieu une tour carrée surmontée d'une plate-forme. Une grande porte donnait entrée dans une cour; elle touchait à la rivière et se trouvait près du pont. Ces corps de logis étaient couronnés par des créneaux et des mâchicoulis, et cinq ou six petites tours, également crénelées, venaient ajouter à l'élégance de la construction et coopérer à sa défense. Une galerie aboutissait à l'église qui touchait au vieux château. Un des corps de logis s'appelait la ménagerie, et contenait les écuries et autres dépendances du château. Le tout était enfermé, du côté de la rivière, par un mur d'enceinte renforcé par des culs de lampe supportant des guérites et des tourelles crénelées. Au-delà de la rivière étaient la ferme et les bâtiments d'exploitation. Quant aux jardins et vergers, ils faisaient suite à l'église et aux bâtiments du château. On voit encore un des culs de lampe à l'angle du mur de clôture du jardin, sur la nouvelle route, vers le pont.

A l'entrée de Roffiac, du côté de St-Flour, on voit une belle croix gothique sur laquelle on a sculpté en pied l'image du patron de la paroisse.

Roffiac fut vendu nationalement à M. Amagat, de St-Flour, qui le donna à son fils en le mariant. M. le comte de Fargues le racheta de lui après l'émigration, puis le revendit, avec les héritages qu'il avait recouvrés, au sieur Joseph Réchaud, ancien valet de chambre de M. de Brugier d'Andelat. Joseph,avait suivi son maître dans l'émigration; ayant dû s'en séparer, il devint cantinier du quartier général de l'armée de Condé, et s'y fit une petite fortune. Mais elle n'était pas assez grande pour restaurer un château comme celui-là. Il en abattit les parties les plus délabrées et le mit dans l'état où il se trouve aujourd'hui. 'Joseph ne fut pas marié. Avant sa mort il revendit tout re qu'il possédait de cette propriété. M. Lafond, ancien juge de paix de St-Flour, acheta le château qu'il possède actuellement.

On nous a communiqué un inventaire constatant l'état du château au 19 mars 1756. On y lit la description complète des bâtiments à l’intérieur et de l'ameublement de chaque pièce. Nos satrapes du jour vont sourire de pitié en songeant au dénuement de ce château, que l'on avait considéré comme princier. Mais alors le confortable était inconnu; les anciens seigneurs se contentaient du nécessaire et mettaient leur luxe dans une armure a l'épreuve ou dans une bonne épée. Plus souvent assis sur la selle de leur coursier que sur les coussins d'un Voltaire, la vie des camps les rendait durs à la fatigue , sobres dans leur vie, peu exigeants dans leurs besoins : couchés souvent sous le chaume, parfois sur la terre, à quoi leur auraient servi les édredons moelleux des seigneurs efféminés de la spéculation moderne; toutes ces inventions voluptueuses, dont on ne peut se passer et qui rendent le prix d'un mobilier plus élevé souvent que l'avoir de nos fashionables, ne pouvaient leur être connues. C'était alors le règne du fer; l'âge d'argent qui devait lui succéder n'avait pas encore affaibli ces mâles organisations.

L'inventaire est dressé par Pierre Molompize, faisant pour M. le comte Méallet de Fargues et son agent, et Claude Teillard, féodiste de la ville de Murat, mandataire de M. Pichot-Duclos, fermier de la terre et baronnie de Roffiac.

« Les experts s'étant rendus au château de Roffiac, commencèrent par la cave, qu'ils trouvèrent en bon état, avec une bonne porte fermant à clef; elle contenait deux cuves en pierre de taille, trois poinçons et trois barriques, le tout presque usé, plus une armoire vide.

D'illec ils entrèrent au rez-de-chaussée, dans la cuisine, qu'ils trouvèrent garnie de tous les ustensiles nécessaires (moins ces moules et petits engins, résultat de nos raffinements culinaires); elle fut trouvée en assez bon état, avec trois armoires, deux en bois de chêne, l'autre en sapin, presque neuve, et fermant toutes à clef; deux bois de lits, garnis chacun de son garde-paille, son matelas, traversin en plume et d'une courte-pointe demi-usée ; cinq chandeliers, deux en laiton et trois en étain , à la nouvelle mode. (Suit le détail de la vaisselle, qui marque que les seigneurs de Fargues recevaient souvent leurs amis.) Dans l'office, en bon état, se trouvaient une grande table en bois de sapin et une petite table carrée du même bois, et une armoire fermant à clef.

D'illec ils furent dans une petite chambre voûtée, à plain-pied de l'office, et la trouvèrent en très-bon état. .

Et d'illec se rendirent à la chambre de M. le comte de Fargues, qu'ils trouvèrent en très-bon état, ornée de tapisseries et d'un grand tableau avec son cadre doré représentant le roi Louis XV. Il y avait de plus douze fauteuils de bois peints en rouge et garnis de jonc.

D'illec ils montèrent à la salle, qu'ils trouvèrent en mauvais état, le plancher ne valant rien et n'ayant ni vitres ni volets aux fenêtres.

D'illec ils entrèrent dans une petite chambre de plain-pied avec la salle; elle était en très-bon état. On y trouva un lit garni de deux rideaux usés, de couleur verte, et d'un garde-paille.

Ils allèrent ensuite dans la chambre de M. le commandeur, trouvée en très bon état, dans laquelle il y avait deux lits garnis de leurs pentes et rideaux; à chacun d'iceux leur garde-paille, à l'un une coite en plume, matelas , traversin et catalogue, et â l'autre est un matelas, traversin en plume et catalogue; les rideaux de l'un étaient de couleur verte et garnis de rubans blancs, et les autres de couleur brune; plus une table à quadrille, garnie d'un tapis vert, un fauteuil pour servir aux malades, garni d'un drap gris.

D'illec ils arrivèrent aux greniers, qu'ils trouvèrent en bon état; le galetas ne valait rien, les couverts étaient à resuivre.et les crépissages à refaire, sous peine de voir les murailles , quoique bonnes, menacer ruine en peu de temps.

Nous ne suivrons pas les experts dans les détails concernant les bâtiments d'exploitation, consistant en écurie, fenière, petite écurie, fournial, poulailler, et enfin les bâtiments du domaine, sis de l'autre côté de la rivière.

L'inventaire constate que la muraille fermant la cour du côté du cimetière s'était abattue par vétusté, et que celle où se trouve la porte conduisant de la cour au jardin est écroulée en partie, et que la porte elle même est en très mauvais état. Enfin, ils consignent que certains créneaux des tours, du côté de l'avant-cour, sont tombés par vétusté, de même que la galerie qui conduisait de la tour de la fenière à la tour du château, dans laquelle se trouvait le colombier.

Enfin, il se trouvait dans le château vingt-une chaises en paille. , Le cheptel, composé de trois paires de bœufs arants, trois vaches pleines ou avec leur suite, une jument pleine, trois doublonnes, deux velles d'un an et dix-neuf brebis, est estimé 960 livres.

Les démolitions faites sans discernement au château de Roffiac lui donnent l'aspect d'une ruine : il ne reste de cette gracieuse conception du moyen âge que La tour carrée et une autre tour octogone qui en est détachée. Le voyageur ne trouve plus cet élégant assemblage de constructions s'harmonisant dans leur ensemble, qui témoignait du savoir de l'architecte , de l'habileté d'exécution des ouvriers et du bon goût de l'époque. Situé dans une riante vallée, baigné par les eaux limpides des ruisseaux des montagnes , au milieu de prairies émaillées de fleurs, encadré enfin par les bois qui recouvrent les coteaux , rien ne pouvait présenter un ensemble plus séduisant.

Le siège du bailliage d'Andelat resta de 1360 à 1450 fixé à Roffiac, après l'érection du duché d'Auvergne en faveur du duc de Berry. L'un des deux lieutenants du bailli des montagnes y résidait et tenait ses assises.

M. Imberdis nous apprend que lors des guerres de la Ligue, le Sr de Rancilhac de Chazelles occupait le château de Roffiac et y reçut le Sr de Lastic. C'est une erreur. Le Sr de Rancilhac, dont le président de Vernyes parle dans son mémoire à Henri IV, ne portait pas encore le nom de Chazelles. Ce fut un de ses neveux qui le prit en 1612 seulement.

On lit dans Audigier, au sujet de Roffiac:

«  Il y a dans ce lieu un château bâti avec magnificence sur la rivière de l'Ande; les vieux titres le traitent de chastel souverain de Roffiac. Le village relève du duché de Mercœur, et le château, de l'église de St-Flour. L'official de Clermont y a eu quelquefois son siège. Un titre daté de 1325, donné en faveur de la Roche, établit ce fait. On lit à la fin qu'Etienne, official, y a mis le seel du chapitre, dont il se servait dans le siège de Roffiac.

Après l'érection du duché d'Auvergne, Roffiac devint le siège du lieutenant du bailli ducal des montagnes , qui y était encore en 1380. Les maisons de Rofiiac, de Davide, de la Volpilière, de Savignon, de Jouvenroux et de Méallet de Fargues l'ont possédé successivement.

Le capitaine Merle s'était rattaché, par sa femme, à Roffiac. Il y avait épousé, le 20 octobre 1576, Françoise d'Auzolles, fille de Guyot d'Auzolles, seigneur de Serre , dont il n'eut qu'une fille. Il est qualifié dans le contrat de gouverneur de la ville de Marvéjols, en Gévaudan. Nous avons annoncé à l'article Saint-Flour, que nous aurions à revenir sur son histoire, qui avait été dénaturée par des ignorants, peut-être, mais plus sûrement par ses ennemis. Il n'entre point dans notre cadre de donner une histoire complète de sa vie; nous nous bornerons à un précis rapide de cette existence calamiteuse, telle qu'on la trouve dans les pièces fugitives de l'histoire de France (Mémoires du. capitaine Goudin, et les archives de la Lozère.

Ce n'est pas que nous voulions réhabiliter cet homme, mais la vérité est due à tout le monde. Si Mathieu Merle avait les qualités de l'homme de guerre, ce courage indompté, cette audace, ce génie, ce mépris du danger, cette force physique qui font les capitaines, il souilla ces qualités par une férocité, un mépris de l'humanité qui en firent un chef de brigands. Le récit de ses atrocités, soit à Issoire, soit à Ambert, tel que l'a donné M. Imberdis, fait de Merle un cannibale, et nous n'y reviendrons pas, et cependant cet homme mourut paisiblement dans son lit, comblé des richesses payées du sang innocent comme de celui de ses adversaires. Mais aussi il était natif de cette terre des Camisards, où tout ce que les passions religieuses ont pu enfanter de cruautés dépasse les limites que l'imagination peut atteindre!

La première rectification que nous ayons à faire est relative à sa naissance.

C'est à tort que l'on a écrit que Mathieu Merle était le fils d'un cardeur de laine d'Uzès. Son père, Antoine de Merle, avait été anobli; dans son testament fait à Uzès le 20 mars 1553, il se qualifie de noble; dans les pièces existantes aux archives de la Lozère, Mathieu a signé partout : de Merle ; il avait deux frères.

Merle commença sa carrière comme arquebusier dans les gardes de M. d'Acier, depuis duc d'Uzès. M. d'Acier le donna à M. de Peyre. son beau-frère. Celui-ci le connaissant homme de courage et d'entendement, en fit son écuyer, et lorsque, en 1572, il alla aux noces du roi de Navarre et de Marguerite de France, il le chargea de la garde de son château de Peyre.

La guerre s'étant allumée. Merle écrivit à ses amis d'Uzès de venir le joindre, et il s'empara du Malzieu. La noblesse du pays vint l'assiéger dans Peyre, mais ne put s'emparer de ce château. Ce fut plus tard que Merle se rendit dans la Basse-Auvergne. Il en revint pour faire lever le siège du château de Mallet, sur la Truyère, où il avait mis une garnison.

Le capitaine Merle devint chambellan d'Henri IV, suivant les archives de la Lozère. Lorsque ce prince était chef des huguenots, il en obtint une commission, le 20 juin 1380, pour commander dans Mende , avec l'autorisation de lever cent chevau-légers et cinquante arquebusiers à cheval pour la défense de cette ville.

Merle s'était emparé de Mende, comme nous venons de le dire. Pour obtenir son consentement à la reddition de cette ville, M. d'Apchier fut contraint à lui vendre la terre de Gorses au prix qu'il voulut, et les habitants du pays furent forcés d'en payer une partie. Il se fit aussi donner par le même seigneur la terre de Salavas, moyennant 8,000 livres, qui restèrent à la charge du pays. Il se fit nommer baron sous ces deux titres. La possession de ces deux baronnies eut lieu en 1583.

Merle testa au château de Salavas le 6 décembre 1583, et mourut avant la fin de janvier de l'année suivante.

Nous mentionnerons les sommaires des mémoires du capitaine Goudin, renvoyant à ces mémoire mêmes ceux de nos lecteurs qui désireraient de plus amples renseignements.

1568. -- Le capitaine de Merle porte l'arquebuse dans les gardes du duc d'Uzès et le suit dans le Poitou. 1570. — D'Uzès le donne a M de Peyre, qui le fait son écuyer.

1572. — De Peyre allant au mariage du roi de Navarre, charge de Merle de

la garde de son château, en Gévaudan, et repousse les seigneurs du pays qui viennent l'assiéger.

1573. — De Merle, avec 300 bons soldats, part de Peyre et se rend maître

du Malzieu. Il va reconnaître Issoire.

1574. — De Merle prend Issoire par escalade et s'y fortifie.

1575. — De Merle, avec 200 cuirassiers a cheval et des arquebusiers, bat la noblesse d'Auvergne qui assiégeait, avec un canon, le château de Mallet dans lequel il avait une garnison. Il vient à son secours, force les assiégeants à s'enfuir, les disperse et s'empare de leur canon qu'ils avaient jeté dans un creux de la Truyère, duquel il le retire.

1576. — Merle, par ordre du roi de Navarre, remet Issoire à Chavagnac et se retire à Uzès.

1577 — Merle s'empare encore du Malzieu par pétards et échelles. Il prend par pétards la ville d'Ambert, fait une tentative sur St-Flour.

1579. — Merle, à minuit, entre par escalade dans Mende.

1580. — St-Vidal, d'Apchier et beaucoup de noblesse s'assemblent à Chanat et envoient un trompette à Merle pour !e sommer de rendre Mende. Merle régale le trompette et le charge de dire à cette noblesse, que si elle ne venait pas le voir, il irait lui rendre visite; réponse dont elle se moque. Dans la nuit, Merle part de Mende avec 100 cuirassiers et 200 arquebusiers, pétarde la porte du faubourg de Marvéjols, enlève 200 chevaux et se retire.

1681 — Châtillon assiège le château de Balsiége, y attire Merle et lui refuse la porte de Mende quand il veut y rentrer. Merle revient à Mende avec 20 chevaux, la garnison se déclare pour lui et il recouvre la ville.

Les exploits du baron de Salavas contiennent plusieurs combats, 15 sièges, 2 au Malzieu, 2 à Issoire, 2 à Ambert, 2 à Mende, ceux des châteaux du Bois, de Balsiége, d'Espagnac, de Quézac et de Bédonese.

Nous aurons à revenir (article Thiézac), sur une expédition faite par lui dans cette partie de nos montagnes.

La vie de ce guerrier est retracée généralement sous des traits odieux, et cependant, dans ces temps si désastreux pour l'Auvergne, il aurait élevé sa renommée au même rang que celle des St-Hérem , des Lastic, des Rastignac  de Missilhac, si la nature avait pourvu son cœur de quelques sentiments d'humanité.

Les villages et hameaux de la commune de Roffiac sont:

Alloziers, hameau qui appartenait, en 1739, à François de Bonafos, écuyer. Il habitait Bellinay avec son frère.

Lieuzargues, gros village sur le chemin de Valeujols; il appartenait à N. Guillaume Chastel, damoiseau, en 1530. Guillaume de Balzac en fit hommage à l'évéque de Clermont en 1345. Austremoine Boyer fut seigneur de Lieuzargues en 1492. Il était maître d'hôtel du roi et avait acheté, en 1487, ce fief d'Henri d'Aurelles; il le revendit à N. Héraud, bourgeois de St-Flour. N. Raymond de Jouvenroux de la Trémolières le possédait eu 1576.

Mazérat, village sur la route de St-Flour avec un petit château composé d'un corps de logis et d'une tour qui appartenait, en 1461, à N. Annet de la Volpilière, seigneur de Roffiac et de Chalusset. Il appartenait, en 1810, à M. Lascols, l'un des médecins célèbres de la Haute-Auvergne.

4° Mons, gros village a l'extrémité sud de la Planèze, sur la route impériale de St Flour à Murat. Il s'y trouvait un petit château, détruit aujourd'hui, avec une tour qui appartenait, en 1592, à N. Antoine d'Escourolles. Louis de la Vernède était titulaire de ce fief en 1668. Balthazar Gillet devint seigneur de Mons-et de Védernat en 1681.

Mons devint célèbre dans le XV° siècle par le combat qui y fut livré entre les habitants de St-Flour et de ses environs, sous le commandement de messire Pons de Langeac, bailli ducal des montagnes d'Auvergne, et les Anglais qui occupaient les châteaux d'Alleuze et de Sailhans. Cette bataille, qui eut lieu en 1412, commença près du bois et du village du Mons. Les Anglais furent défaits; ils se retirèrent en désordre d tns le village de Roffiac, et dans leur fuite un grand nombre fut tué; aussi trouvait-on naguère encore des ossements humains dans les champs voisins. Cent prisonniers furent conduits à St-Flour, et nous avons vu, au sommaire des archives de cette ville, que Jean Mercier, consul, se rendit complice de leur évasion.

Molin-de-Blau, hameau.

Moulin de-Lachal, hameau.

Moulin-de-Vedernat, hameau.

Prend-te-Garde (prends garde à toi), hameau sur le milieu de la côte de Roffiac, fort isolé et près des bois. La chronique rapporte que plusieurs personnes y avaient été arrêtées et qu'un malfaiteur, connu sous le nom de Lanière, s'y était retiré. Il fut arrêté et supplicié à St-Flour.

Rivet, village sur la route impériale de St-Flour à Murat.

10° Védernat, village au sud du bourg, près de Lieuzargues. Robert Boyer, seigneur d'Onnezat (la Roche-Blanche), possédait ce fief en 1553; Bertrand Pentclobe, vassal du duc de Mercœur, fut seigneur de Védernat en 1450; Marc de Langeac, en 1543; Balthazar Gillet, en 1681.

On a trouvé, il y a peu d'années, dit M. Déribier, en élargissant la route impériale, une portion de mâchoire d'un animal antédiluvien, qui fut envoyée à Clermont. Ce fait nous parait douteux, parce que ce pays est volcanique et qu'il ne s'y trouve aucun dépôt calcaire.

Les abords de l'église de Roffiac ayant été dégagés par le percement de la nouvelle route et la démolition du vieux château qui se reliait à elle, cet édifice a gagné sous le rapport de la grâce et de la majesté.

Il existe à Roffiac, depuis une vingtaine d'années, une filature qui occupe une quarantaine d'ouvriers.

On y remarque aussi une école communale pour les deux sexes.

Les terres labourées donnent un bon produit, quoique sujettes aux ravines dans quelques parties. Les prairies sont de bonne qualité.

La base du sol est volcanique et schisteuse. M. Bouillet dit que l'on retrouve, en descendant à Roffiac, le sol primordial toujours le même que celui sur lequel reposent les grandes formations du Cantal.

Roffiac avait une maladrerie de fondation commune, à la nomination de l'évêque. Son revenu était de 200 livres.

Cette commune était de droit écrit relevant d'Aurillac.

Le prieuré de Roffiac était séculier, et uni au chapitre de l'église neuve de Notre-Dame de St-Flour. La vicairie en était perpétuelle et à la collation de l'évêque.

Roffiac fut imposé à 2,55o liv. dans la répartition des tailles de l'élection de St-Flour pour l'année 1696.

P DE CHAZELLES.

 

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