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NEUVEGLISE.
Cette commune est comprise dans le canton sud de l'arrondissement de St-Flour. Elle forme un carré long du nord-est au sud-ouest, et se trouve bornée au nord par celles de Cussac et des Ternes; au sud, par la rivière de Truyère, qui la sépare de Chaudesaigues et de l'Espinasse; à l'est, par la commune de Seriers et le ruisseau de Béquet, qui la sépare de Lavastrie ; à l'ouest, la rivière d'Epie entre elle et la commune d'Oradour.
La surface de son territoire est de 5,400 hectares, dont 3,050 h. en terres cultivées; 1,600 h. en prés et pacages; 250 h. en bois, et 500 h. en terres vaines et bruyères.
Elle est arrosée par les rivières de Truyère, d'Epie; les ruisseaux de la Chaumette, de Béquet, de Neuvéglise, de Tagenac, de Vernejol ou de la Tourelte, de la Vergne, de Chassagne, de Sieujac, de Chanet, etc., qui vont presque tous déverser leurs eaux dans la Truyère.
Sa population est de 2,216 habitants, répartis dans 24 villages, 4 hameaux et 620 maisons.
Cette commune, l'une des plus considérables du département, renferme trois succursales, savoir : Neuvéglise, Tagenac et Fressanges. Nous en parlerons plus loin.
Neuvéglise, chef-lieu de la commune, à i myr. 6 kil. de St-Flour, est un gros bourg de 300 habitants. « Ce bourg, dit Audigier, dans la plus grande paroisse de la Haute-Auvergne, est près de la rivière d'Epie, qui se jette dans la Truyère. »
L'église, sous l'invocation de saint Baudeil dont elle possède des reliques, dénote par sa construction une assez haute ancienneté; elle n’a, du reste, rien de remarquable. Audigier dit qu'elle relevait de la mense de St-Flour.
Neuvéglise, à ce qu'il parait, était au IX° siècle une viguerie où résidait un lieutenant du comte d'Auvergne. Ce bourg portait anciennement le nom de Valeilhes. Amblard et Astorg, son frère, comptors de Valeilhes, donnèrent, en 1050, à Hugues, abbé de Cluny, l'église de Valeilhes avec ses dépendances. Cette église étant tombée en ruine par vétusté ou pour toute autre motif, dut être reconstruite; celle qui la remplaça fut désignée sous le nom d'Eglise-Neuve, qui prévalut insensiblement, et Je nom de Valeilhes se perdit.
Audigier avance que cette terre avait appartenu dans les temps reculés à une maison portant le nom de Louchon. Nous ignorons si ce fut cette maison qui prit le nom de Neuvéglise ; mais, en 1259, on trouve Sicard de Neuvéglise, damoiseau, viguier ou haut-justicier du lieu.
Il y avait trois châteaux du nom de Valeilhes, et par conséquent trois coseigneurs.
Le château supérieur ou le suzerain fut porté, en 1228, à la maison de Lastir, par Alix de Valeilhes, qui en était héritière. Bompar 1er de Lastic, qui l'avait épousée , devint par là le premier seigneur de ce nom. Il fut du nombre des chevaliers d'Auvergne qui réclamèrent le maintien de leurs privilèges auprès d'Alphonse, comte de Poitiers, frère de Saint-Louis, parce que les officiers de ce prince les avaient méconnus ; il participa à ta transaction qui eut lieu sur ce que Von nommait alors la terre d'Auvergne, et depuis le duché d'Auvergne. Les franchises et immunités de la noblesse de cette province y furent reconnues.
Bompar II Bertrand eut des différends avec Etienne de Lastic, son petit-neveu, au sujet de ses droits héréditaires. Il intervint entre eux, en 1527, une sentence arbitrale touchant ses prétentions sur le château de Valeilhes, dans laquelle il fut dit « qu'Etienne de Lastic pourrait seul exercer la justice civile et criminelle, et avoir le droit de four banal. »
Cette sentence décida aussi que le droit que Bertrand de Lastic était encore dans l'usage de percevoir depuis le moulin du Pont jusqu'au pont de Valeilhes appartiendrait dorénavant à Etienne, sans que Bertrand et les siens pussent rien demander dans les limites de Valeilhes et les eaux y enfermées.
Le deuxième château de Valeilhes appartenait à la famille du Bec. La famille de Rocher le possédait auparavant. Bernard du Rocher, damoiseau, est le dernier connu. Ce deuxième château inférieur fut apporté, en 1266, à la maison de Lastic, par Julienne du Bec, héritière de sa famille.
Le troisième château, également inférieur, était possédé par une maison de Valeilhes. Bompar III Pierre 1er de Lastic en fit l'acquisition ; elle est établie par son testament, en date de 1299, dans lequel il donne à son fils, chanoine-comte de Brioude, la jouissance du château-bas de Valeilhes, acheté par lui. Ainsi, par suite de son mariage avec Julienne du Bec, Bompar III réunit toute Ja seigneuriè de Valeilhes.
Les deux châteaux inférieurs étaient soumis au supérieur, qui prit plus tard, vers 1472, le nom de Rochegonde.
La terre de Neuvéglise passa dans la famille de Lastic, en 1537, par le m.iriage de Claude de Lastic avec Marguerite de Farges, dame de Sieujac, fille do Jeanne de Neuvéglise , héritière de Jean de Neuvéglise , son frère , dernier représentant de cette famille. Pierre de Neuvéglise, chanoine-comte de Brioude, est le dernier qui ait porté ce nom ; il mourut en 1598. Guérin de Neuvéglise, seigneur de cette terre, oncle maternel de Marguerite, promit dans le contrat de mariage de la nourrir, avec son mari et leurs équipages, suivant leur qualité, dans son château de Neuvéglise pendant trois années. Claude de Lastic acheta a'ors de Jean de Neuvéglise, son beau-frère, cette seigneurie moyennant 15,000 livres, y compris le château et le domaine.
Jean de Lastic, fils de Claude et de Marguerite de Farges, fut seigneur de Neuvéglise enU6OO; il céda cette terre, en 1610, à Philibert, leur fils, avec le consentement de Marguerite d'Espinchal, sa consorte.
Revenons en arrière, à une époque de grandes perturbations dans la maison de Lastic. Louis avait épousé, en 1490, Anne de La Fayette. Il fut stipulé dans son contrat qu'elle aurait pour douaire, en cas d'enfants ou non, 200 livres de rente, avec un château fort, jardin et autres aisances; il fut aussi convenu que le premier enfant mâle a naître de leur mariage aurait en préciput les châteaux de Lastic, de Rochegonde et de Montsuc ; et que, dans le cas où il n'y aurait pas d'enfants mâles ni son héritier non plus, les filles succéderaient à cet avantage.
Louis de Lastic eut dix garçons d'Anne de La Fayette. Jacques, son fils aîné, n'eut point d'enfants de N. de Peronenc de St-Chamarand.
Le caractère de Jacques était processif. 11 eut des démêlés avec Anne, sa mère, pour son douaire; avec Anne de Lastic , dame Dubourg de Saillans, sa cousine germaine, pour sa part dans la succession paternelle et maternelle; avec le chapitre de St-Flour, pour des rentes constituées par ses prédécesseurs.
Jacques étant sans héritier direct, disposa de sa succession. Louis de Lastic, chevalier de Malte et grand prieur d'Auvergne, était son premier frère; le second, Jean de Lastic, prieur de Thérondel, était engagé dans-les ordres; Jean-Jacques de Lastic, son troisième frère, devait lui succéder naturellement, et, à son défaut, Claude de Lastic, son quatrième frère. Pour des causes dont le souvenir n'a pas été conservé dans les traditions de la famille, par son testament du 5 septembre 1529, Jacques déshérita ses frères Jean-Jacques et Claude de Lastic, appela à lui succéder aux possessions de la famille Georges de Lastic, son cinquième frère, qui ire fut point marié, et, dans le cas encore où il décéderait sans garçon , Thibaud de Lastic , son plus jeune frère, et l'institua son héritier universel.
Or, il résulta de ces diverses substitutions, que les seigneuries de Lastic, de Rochegonde et de Montsuc, Thibaud n'ayant eu qu'un fils d'Anne d'Ancézume de Caderousse, mort sans avoir été marié, le cas prévu dans le contrat de mariage d'Anne de La Fayette se présenta. Françoise, sa fille, hérita de Lastic, Rochegonde et Montsuc, et par son premier mariage avec Joseph de Foix, où elle n'eut qu'une fille aussi, et par son second mariage avec Jean de la Guiche, dont elle n'eut qu'une fille, leur porta ces trois seigneuries. C'est ainsi que la terre de Lastic, qui avait donné son nom à la famille, passa dans des mains étrangères par suite de l'acte de violence de Jacques envers ses frères.
Thibaud de Lastic ne jouit pas longtemps du passe-droit que son frère avait fait à son égard II mourut peu d'années après avoir pris possession des biens de sa famille. Jean-Jacques de Lastic n'existait plus, et Claude vint reprendre la succession mutilée de Lastic. Il devint seigneur de Sieujeac, et nous le retrouverons dans cette localité. Quant à Thibaud, il laissa un fils de Jeanne Var (non marié), qui forma la branche des Lastic de Fournol et que nous retrouverons à Rochegonde.
Les Anglais occupaient Valeilhes en 1388, et nous avons vu aux comptes de St-Flour (p. 119) que cette ville avait payé pour marque de sa garnison, le 28 juin de cette année, à Jean de Bordeaux, son capitaine, la somme de 31 livres 12 sols 6 deniers. Ils le brûlèrent en 1396; mais il fut rétabli peu de temps après. Jean de Neuvéglise en était alors seigneur. A la fin du XVI° siècle on voyait encore les ruines imposantes du vieux château de Valeilhes.
Le presbytère et la maison d'école de Neuvéglise ont été construits depuis peu d'années.
Neuvéglise a une distribution de la poste aux lettres, relevant des bureaux de poste de St-Flour et de Chaudesaigues. Outre Neuvéglise, elle dessert les communes d'Alleuze, de Cussac, de Sériers et de la Vastrie.
On a trouvé à Neuvéglise, en 1840, en labourant un champ, un vase en terre dans lequel étaient une centaine de pièces d'argent de la valeur de 60 centimes chaque. Ces pièces, parfaitement conservées, portaient l'effigie des empereurs romains Auguste et Domitien. Le vase ayant été brisé par le soc, on fit de nouvelles recherches et l'on recueillit encore une cinquantaine de pièces de la même valeur.
Neuvéglise suivait la coutume et relevait de Riom. Les villages et hameaux de celte commune sont:
1° Audes (les), hameau situé au point culminant de la cote du mémo nom, sur la route impériale, près de Cordesse.
2° Baraque-de-Chambernon, hameau sur la route de Pierrefort.
3° Baraque-de-Duranton, hameau.
4° Baraque-de-Peyrelade, hameau situé sur la route.
5° Bastide (la), village au sud de Neuvéglise, sur le ruisseau de Verneujols.
6° Budiès, village à l'ouest du bourg.
7° Chambernon, gros village dans la plaine, près de la route de Pierrefort à St-Flour. François d'Espinchal en était seigneur -en 1632, et N. Lamouroux en 1789.'
8° Chassagne, village à l'est de Neuvéglise, sur le ruisseau de Lavastrie.
9° Chaumette (la), village fort éloigné du chef-lieu, sur le chemin de Cussac. 11 y avait un château qui appartenait, en 1747, à Gabriel l'Huillier-d'Orcières, de Chaudesaigues, seigneur en partie de Rochegonde. Il passa à ses héritiers.
Nous avons reçu la communication d'une vente authentique faite par messire Gabriel l'Huillier-d'Orcières, chevalier, seigneur d'Orcières, de la Chaumette et autres places, à M. Guillaume Beaufils, négociant, habitant de la ville de St-FIour, seigneur du Dauzan, coseigneur de Roneyre-Vieille et Sebeujol, de la terre et seigneurie de la Chaumette, paroisse de Neuvéglise, formée de la réunion des démembrements faisant partie des terres de Rochegonde et des Ternes, consistant en droits de justice haute, moyenne et basse, main-mixte impaire sur ledit lieu de la Chaumette, divers villages, hameaux et tènements dépendant des paroisses de Neuvéglise, les Ternes et Cussac. Le prix de cette vente s'élevait à 170,200 liv. Elle comprenait le château de la Chaumette; du produit annuel de deux cent trente septiers de tout espèce de grains, mesure de Rochegonde; des droits de lods, ventes, prélations et autres droits de directe et seigneurie; outre et par-dessus, les rentes auxquelles est asservi le domaine ci-après (suit le détail du domaine); un héritage de la mouvance du Sr de la Rochette; trois septiers de blé seigle de rente foncière due par les habitants d'Aluzet sur le tènement de Gorre.
En ce qui concerne le domaine dont nous venons de parler, il se trouve dans cet acte un inventaire détaillé s'élevant à la somme de 470 livres, concernant surtout les ustensiles d'exploitation dont nous ne parlerons pas.
Comme par l'inventaire du mobilier vendu du château on trouve sa description, nous allons en extraire les passages suivants: « 1° Inventaire des ustensiles meublant la cuisine, abondamment pourvue ; 2° inventaire de la cave; 5° meubles existant dans la salle à manger; 4° mobilier du salon, consistant en une glace, une petite table, sept chaises et la garniture de la cheminée; 5° une chambre appelée la Chambre-Basse, dans laquelle se trouve un lit à coquille avec son ciel-de-lit et rideaux et garde-paille, un autre bois de lit avec ses pentes, un matelas, une couverture blanche, six chaises en bois, un bois de lit pour enfant, un chandelier d'étain, un de cuivre jaune, une lampe en cuivre, un chauffe-pieds, etc.; 6° les meubles qui sont au-dessus de la cuisine consistent en une glace, deux tables dont une avec tiroir, deux chandeliers en cuivre jaune, un tableau représentant le Christ, un fauteuil à deux bras, autres deux fauteuils couverts en moquette, cinq chaises garnies en jaune, un bois de lit à la duchesse avec sa garniture en étoffe verte, trois grandes tapisseries à ramage , une demi-tapisserie de même couleur, trois tapis de table, deux pentes pour le lit, fleur jaune, rubans bleus, une autre petite tapisserie, une garniture de rideaux bruns, bordée de rubans bleu-de-ciel, une garniture de lit en rubans bleu-de-ciel, une garuiture en rubans verts, trois pentes grises garnies de rubans bleus, une cheritière ruban rouge, une courtepointe d'étoffe brune , deux matelas, plus un plus petit, une couverte de taffetas de plusieurs couleurs, une couverture de taffetas jaune et vert, etc., etc. » La valeur du mobilier est évaluée 1,590 livres pour colle pièce.
Les pièces dont le mobilier est encore inventorié sont:
« 1° Chambre au-dessus de la salle à manger, où se trouvait une glace; 2° la chambre de M. d'Orcières, ayant aussi une glace ; le mobilier en est confortable, eu égard à celui des autres pièces; 3° les meubles de la chambre au-dessus de la chambre basse, ayant aussi une glace, des fauteuils à bras, un autre fauteuil garni de sa chemise et six fauteuils recouverts en moquette, lit à la duchesse , etc., etc.; 4° enfin , les meubles de la chambre neuve , consistant en glace, commode, une pendule , lit à la duchesse, fauteuils, chaises en fer, trois pièces de tapisserie. »
Nous ne parlerons pas du mobilier déposé dans les greniers et les corridors, du linge déposé dans les armoires, le tout évalué à la somme de 9,788 livres, somme considérable pour le mobilier de cette époque.
Il se trouvait aussi au château un pavillon a l'aspect occidental du château, sur le jardin, ayant un passage entre les deux, dont la jouissance était réservée, sa vie durant, pour son usufruit, à dame Marie Besson de Montignac, mère de M. Claude l'Huillier-d'Orcières, seigneur d'Orcières.
Cet acte fut passé au château de la Chaumette, le 5 juin 1789.
10° Cordesse, gros village que traverse la route impériale et qui appartenait, en 1599, à Louis de Neuvéglise.
11° Costeyras, village sur le petit ruisseau de Verneujols.
12° Fraux (les), village.
13° Frestange, fort village dans la plaine, érigé en succursale en 1837. Son église était dédiée à sainte Anne. Elle n'était qu'une simple chapelle au commencement du XVIII° siècle. Ce lieu a vu naître Antoine Durand, auteur de plusieurs ouvrages, et qui vivait au Xvii° siècle. Il a existé une famille du nom de Fressange. Béralde du Bec, avec l'autorisation de Guyonnet de Fressange, son mari, fit don, en 1323, à Pierre de Lastic, de tous ses droits et actions sur le Mas et territoire de Valeilhes.
14° Gros; village au sud du chef-lieu.
15° Lher, village sur la route impériale, laquelle traverse la côte de la Nau.
16° Malinay, hameau au confluent de l'Epie et de la Truyère.
17° Mallefosse, village sur le ruisseau de Verneujol. Il appartenait, en 1626, à L. de Larochefoucauld.
18. Monteix, village à l'ouest de Neuvéglise.
19° Nau (la), village sur la Truyère, avec un pont sur lequel passe la route impériale de Chaudesaigues. La côte de la Nau est célèbre dans la Haute-Auvergne par sa longueur de 4 kilomètres, la rapidité de ses pentes et l'escarpement de ses rochers, vraiment -effrayants pour les habitants des pays de plaine. « La route, dit AI. Bouillet, a été péniblement tracée sur le bord de ravins et de précipices effroyables. Les travaux de cette route ont mis à nu des coupes magnifiques qui facilitent les recherches des minéralogistes, et laissent voir aux géologues les couches entortillées de gneiss et de micaschiste, traversées de filons de quartz, avec tourmaline; des masses plus ou moins volumineuses de mica, etc. Le gneiss et le micaschiste y sont très-variés; on observe surtout de belles variétés de cette dernière roche à mica noir.
Au milieu à peu près de la côte de la Nau, au ravin appelé le Saul-du-Loup . le rocher bizarrement excavé, à gauche de ce ravin, présente l'aspect d'une énorme tête de monstre; les yeux, la gueule, le menton, tout est bien figuré; aussi les habitants du voisinage en font-ils l'épouvantail de leurs petits enfants. »
« Le chemin qui conduisait de St-Flour à Chaudesaigues dit Legrand (d'Aussy), était en quelques endroits si serré, il avait des parties si rocailleuses, des montées et des descentes si rapides, qu'il n'était point praticable aux voiture». C'est main_ tenant une grande route, douce, facile, et vraiment étonnante par les difficultés qu'on a eues à vaincre dans certains passages. Telle est spécialement la partie qu'on a nommée le Saut du-Loup, et qui, commençant au-dessous de Sieujac, cotoie le ruisseau de ce nom jusqu'à son embouchure dans la Truyère, puis la Truyère, jusque vers l'endroit où on la traverse.
Ce nom de Saut-du-Loup lui a été donné parce qu'elle règne sur la croupe d'une montagne très-escarpée, du haut de laquelle se précipita , il y a quelques années, un loup poursuivi par des chiens de berger. La mort de l'animal qui, dans sa chute, périt brisé, annonce quelle pente rapide a la montagne. En effet, lorsqu'il fallut y tracer le chemin, on fut obligé de suspendre avec des cordes les ouvriers, qui plantèrent les jalons. La roche est un granit à éléments très-fins, mais dont la dureté est telle qu'on n'a pu l'entamer qu'avec la poudre à canon. Pour la seule opération de la mine, il en a coûté autant en instruments de fer qu'en poudre, et néanmoins cette roche si dure, cette montagne si roide, on les a ouvertes et creusées dans une longueur de 2,000 mètres. »
« Au-dessous de ces rochers si escarpés, dit encore M. Bouillet, on longe pendant quelque temps la rivière de Truyère, que l'on traverse sur un pont à trois arches nouvellement construit. Ce pont est le port de salut pour le voyageur. Sa vue, fatiguée de l'immense précipice sur le bord duquel il vient de passer et de l'espèce de désert qu'il vient de parcourir, maintenant se repose agréablement sur les bords riants et habités de cette rivière. »
Le voyageur ne doit pas s'effrayer outre mesure des dangers de cette route, des rochers qu'il voit suspendus sur sa tête, des profondeurs immenses et à pic que son œil ose souvent fixer; quoique très-escarpée dans la côte de la Nau, elle est suffisamment large et bien entretenue. Elle prouve, du reste, l'habileté de nos postillons montagnards; malgré l'extrême rapidité avec laquelle ils conduisent dans la descente, il est presque hors d'exemple qu'il soit arrivé un accident.
20° Orcières, gros village dans la plaine, au sud de Neuvéglise. Alexandre l'Huillier en était seigneur en 1768. Cette famille en avait pris le nom.
21° Peyrelade, village à l'est et tout près de la route impériale.
22° Rochegonde, village où l'on voit encore les ruines d'un château, sur le ruisseau de ce nom, à l'ouest de Neuvéglise. Il y avait, en 1690, une chapelle sous l'invocation de sainte Barbe, comme celle de Fressanges; elle existe encore.
« C'était, dit Audigier, une seigneurie considérable. Il y avait autrefois deux châteaux : l'un nommé Valeilhes, et l'autre Rochegonde. Plus tard ils furent unis, et le dernier nom a prévalu sur l'autre. »
Nous avons vu que les seigneurs les plus anciennement connus portaient le nom de Valeilhes, et que cette terre passa à la maison de Lastic par le mariage, en 1228, d'Alix de Valeilhes avec Bompar Ier de Lastic. Cette seigneurie resta dans cette maison jusqu'à la fin du XVI° siècle, comme nous le dirons, où elle fut portée dans la maison de La Guiche, puis à celle de Larochefoucauld, comte de St-Ilpize, à l'exception d'une portion que François, frère de Gaston, donna, avant 1684, à Claude l'Huillier d'Orcières, contrôleur général de la connétablie de Bordeaux, dont les descendants la possédaient encore en 1780. La portion restée aux comtes de St-Ilpize revint au comte de Lastic de Fournel, en 1738, du chef de Marie-Madeleine-Simone de Larochefoucauld-Lanjac, mariée à Hyacinthe de Lastic. Jean-Antoine de Lastic, maréchal de camp, seigneur d'Allanche, son fils, en jouissait en 1789.
Bompar 1er de Lastic fut donc le premier de sa maison qui prit possession de Rochegonde. Sa seigneurie resta sans mutation jusqu'en 1472, où la branche directe s'éteignit dans Draguinet, déjà cité dans cet ouvrage et qui mourut n'ayant eu que des filles.
Pons de Lastic, frère de Draguinet, reprit la descendance. Jean Roux était alors capitaine et bailli de Rochegonde. Jean Roux, par ordre de Draguinet, remit à Pons les clés du château et de la forteresse, et lui ouvrit les portes du château.
Anne de La Fayette, femme de Louis de Lastic, étant devenue veuve, par accord avec ses enfants, prit possession, le 29 juillet 1522, de la terre et château de Rochegonde, pour son douaire, avec les meubles et autres appartenances et dépendances, ensemble la somme de 200 livres tournois à prendre sur ce mandement.
Rochegonde suivit le sort de Valeilhes et passa dans les familles de Foix, de La Guiche et de Larochefoucauld-Langeac. Cette terre fut partagée en trois, en 1650, savoir : un tiers à Louis de Larochefoucauld, père de Mme de Rochegonde, qui épousa M. du Gibertès; un autre tiers à M. Henri-Gaston de Larochefoucauld St-Ilpize, et l'autre tiers advint, comme nous venons de le voir, par François, frère d'Henri-Gaston de Larochefoucauld, à Claude d'Orcières. Henri Gaston mourut en laissant un fils, Jean-Antoine de St-Ilpize, âgé de quatre mois. Il eut pour tuteur M. de Bournoncle, son oncle Le bien de M. de St-Ilpize se trouva chargé de certaines dettes passives : lès créanciers voulant sans doute être payés, pressèrent le tuteur qui, n'ayant pas d'argent, donna en paiement du bien de son pupille, aux enfants de feue Mme de Rochegonde, épouse de M. du Gibertès. M. de St-Ilpize étant devenu majeur, obtint un arrêt du parlement de Paris, qui lui permit de rentrer dans ses biens en payant les créances. A l'aide de cet arrêt, il paya tous les créanciers en billets de banque qu'il emprunta, à l'exception de Mlle de Neuvéglise , fille de Mme de Rochegonde et sœur des autres créanciers.
Jacques de Lastic, fils de Thibaud et de Jeanne Var, non mariés, dont il a été parlé, releva noblement par ses brillants services et ses talents militaires ce que sa naissance avait d'incorrect. Capitaine d'une compagnie de cent arquebusiers, il se distingua au siége de La Rochelle, et après la soumission de cette place, il fut légitimé et anobli par le roi. Thibaud, son père, tout en transmettant la seigneurie et le château de Rochegonde à Françoise, sa fille, réserva pour Jacques, dans les dépendances de Rochegonde, des possessions qui lui assuraient une existence honorable. Ces possessions, jointes à son grand mérite, firent qua Jacques contracta une alliance avec l'une des familles les plus haut placées du pays. Il épousa Marie d'Apchier, dame de Haute ville, héritière de cette branche, et elle lui porta en dot la terre et château de Fournel, en Gévaudan, que leurs descendants possèdent encore. Il en eut quatre fils, dont l'aîné et le quatrième reçurent le prénom de Philibert.
Philibert, son fils aîné, fut aussi un homme recommandable. Il devint gentilhomme de la chambre du roi et commissionné pour le tour des Etats du Languedoc. Il résida a Fournel.
L'autre Philibert continua à résider à Rochegonde, dont il était coseigneur. Joseph, son fils, avait épousé Marguerite de Pontaut ; la branche de Rochegonde provint de ce mariage. Puissante dame Marguerite de Pontaut reçut de Catherine Besson, habitante de Rochegonde, donation de tous ses biens présents et à venir, sans en rien retenir qu'une pension viagère de 2 septiers de seigle, 3 livres de beurre, 8 livres de lard, sa résidence dans le bas de sa maison, le tout eu cas d'incompatibilité ; une robe de laine pour l’hivernie, de trois en trois ans. Dans cet acte, Marguerite de Pontaut déclare qu'elle est dans l'incertitude de savoir si son mari est en vie ou non, l'ayant abandonnée depuis deux ou trois ans sans lui laisser rien pour vivre. Il parait, que pour soulager sa détresse, M. de Larochefoucauld-Langeac lui concéda une part des produits de Rochegonde.
Cette deuxième branche de Lastic de Rochegonde résida dans cette localité jusqu'en 1780 environ, où M. de Tremolière, curé de Notre-Dame de Bordeaux, attira ses neveux de Lastic dans cette ville, où leur descendance est restée fixée. Cette branche des Lastic de Rochegonde est représentée aujourd'hui par M. Alfred-Louis-Guillaume, capitaine de frégate, chevalier de la Légion-d'Honneur, dernier des Fournel.
Le 30 septembre 1693 furent tenues à Rochonge les assises générales de ce comté. Plusieurs défenses furent faites à ses vassaux, et entre autres celle de jurer et blasphémer le nom de Dieu, ni d'aucun saint ou sainte du paradis, à peine, la première fois, de 3 livres d'amende; la deuxième, de punition corporelle, et si l'on renouvelle le délit, suivant les ordres royaux, on aura la langue percée avec un fer chaud. Au nombre des vassaux sont cités : les seigneurs de Montvallat, d'Espinchal et le chapitre noble de St-Flour.
Vers 1560, le château de Rochegonde fui fortifié à cause des guerres civiles, et, en 1580, on y avait placé un canon. Les religionnaires ne s'en emparèrent pas moins en 1594.
La baronnie de Rochegonde fut délaissée en jouissance, le 7 juin 1538, par Thibaud, à Louis de Lastic, grand prieur d'Auvergne.
Dans une rencontre. Gérard Gondonnet, capitaine de Rochegonde, fit prisonnier Aymérigot-Marcheix, et ne lui rendit la liberté que moyennant une rançon de 5,000 livres.
'Le sieur de Lastic, dit le président de Vernyes, possède une maison très-forte à Rochegonde, en laquelle il y a une pièce de canon moyenne.
» Rochegonde, dit-il plus loin, est du nombre des forteresses quasi imprenables, tenues par les ennemis du roi. Si vous y venez forts, vous y êtes combattus par la nécessité et âpreté du pays, et par l'incommodité que ces châteaux vous donnent; le canon ne peut rouler et doit passer par des détroits ou deux cents hommes en déferont dix mille, et vous ne pouvez y camper plus de quatre mois. Si on y va faible, on est battu car ils peuvent être secourus.
Quant à la famille l'Huillier d'Orcières, coseigneur de Rochegonde, par donation de Jean-Joseph de Larochefoucauld, de 1757, elle habitait le château de la Chaumette, comme nous l'avons dit.
Vers 1780, M. Vigières Desfarges acquit les deux-tiers de Rochegonde; ils subirent les confiscations révolutionnaires. Les ruines du principal château appartiennent en ce moment à Mme Creuzet, sa petite-fille, dont le mari est député.
23° Sieujac, village assez près de la route impériale. C'était une seigneurie avec un château qui a été pris et repris souvent au temps de la Ligue. On voyait naguère les ruines imposantes de cette forteresse.
Lorsque la branche directe de la maison de Lastic fut éteinte et privée de Rochegonde par suite de la substitution faite à Françoise, Claude de Lastic, marié en 1537 avec Marguerite de Farges, dame et héritière de Sieujac, vint fixer dans ce château la résidence de sa famille. Jean de Lastic, fils de Claude, rendit le nom de Sieujac célèbre dans la province. Nous avons parlé de lui à l'article Lastic et, quoiqu'il eût fait un grand nombre d'autres actions mémorables, nous nous abstiendrons d'en parler ici.
Philibert de Lastic, son fils, fut nommé, le 4 septembre 1630, par Marie, reine de France, mère du roi, â la charge de capitaine de Châteauneuf, en Carladès; il en prit possession le 18 septembre suivant et fit, en cette qualité, le 16 avril 1631, dresser un procès-verbal de l'état des bois du roi, par le juge de la vicomté de Murat, pour en constater les dégradations. Il mourut en 1637, des suites d'une blessures. Son fils, Jean-Antoine, devint prieur de Bredon et fit l'acquisition de la vicomté de Murat. Nous l'avons vu dans l'une et l'autre de ces localités.
François Ier de Lastic, vicomte de Murat, fut aussi capitaine de Châteauneuf et guidon de la compagnie du duc de Candale. Il fui blessé au combat de Solsonne, en Catalogne, le 19 septembre 1665 et reçut une lettre sympathique du même duc pour le féliciter de sa belle conduite; il fut maintenu dans sa noblesse par sentence de M. de Fortia , du 10 juillet 1667; il fut commis par lettres du roi Louis XIV, de 1697 et 1701, pour coopérer, avec l'intendant de la province, à la 'répartition de la capitation sur la noblesse de l'élection de St-Flour.
François II de Lastic, dit le marquis de Sieujac, vicomte de Murat, fit 1 acquisition du château de Parentignac, près d'Issoire, et fut y résider avec sa famille.
La branche de Lastic de Sieujac s'est éteinte dans cette résidence, dans François V, colonel des grenadiers de France. Depuis la dispersion de la famille, cette branche avait été la plus illustrée. C'est d'elle qu'était sortie la branche de Lastic-St-Jal dont nous ne parlerons pas ici, parce qu'elle fut se fixer hors de notre province.
Sieujac relevait de la baronnie de Mercœur et avait longtemps appartenu à la maison d'Apchier.
24° Tagenac. gros bourg de 350 habitants, à l'ouest-nord-ouest de Neuvéglise; il a été érigé en succursale en 1802. Son église est sous l'invocation de saint Adon ou Abdon. On y voit quelques jolies maisons. La seigneurie de Tagenac, jadis assez étendue, fut réunie à celle des Ternes et a appartenu à la maison d'Espinchal. Henri-Joseph de la Garde, marquis de Chambonnas, héritier d'Henriette d'Espinchal, sa mère, fut en 1697 seigneur de Tagenac. Le chapitre cathédral de Saint-Flour a joui quelque temps de Tagenac, l'ayant acquis du seigneur Dupuy-Chalm, qui en était possesseur.
25° Tagenac. moulin.
26° Taitlade, village au sud du chef-lieu et dominant la gorge profonde de la Truyère.
27° Uchafol, hameau sur la Truyère.
28° Vergne (la), hameau,
29° Verneujol. village au nord de Neuvéglise.
Les terres sont d'un bon produit en seigle, surtout dans la plaine; ses pacages sont estimés, quoique un peu marécageux.
Neuvéglise a quatre foires très-fréquentées; elles ont lieu les 15 mars, 21 mai, 21 juin et 20 octobre.
Jacques de Lastic obtint, en 1525, des lettres du roi pour l'établissement d'une foire à Rochegonde; on les a portées à trois : le 4 mai, 30 juin et 25 novembre.
Neuvéglise fut imposé, en 1696, à 2,350 livres.
Neuvéglise était à la présentation du chapitre de St-Flour, et la chapelle de Valeilhes, à la collation de l'évêque.