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MONTMURAT. — Cette commune est comprise dans le canton de Maurs et l'arrondissement d'Aurillac. Elle est bornée au nord par le ruisseau de Tourloureyre, qui la sépare de St-Santin-de-Maurs ; au sud, à l'est et à l'ouest, par les départements du Lot et de l'Aveyron, communes de Montredon (Lot), de Livinhac et de Saint-Santin-du-Rouergue (Aveyron), en sorte que cette commune forme une presqu'île avancée dans ces deux départements.

La surface de son territoire est de 500 hectares, dont 250 h. en terres labourables; 100 h. en prés et pacages; 40 h. en châtaigneraies; 40 h. en vignes; 30 h. en bois, et 40 h. en bruyères.

Elle est arrosée par les ruisseaux de Lorcin, de Tourlbureyre, etc.

Sa population est de 395 habitants, répartis dans 8 villages, 18 hameaux et 77 maisons.

Montmurat, le chef-lieu , placé au centre de la commune, est à 1 myr. 4 kil de Maurs , et à 5 myr. 9 kil. d'Aurillac. Il est bâti en amphithéâtre sur le flanc d'un riche coteau, et se trouve abrité contre le nord par le sommet du rocher.

L'ancienne chapelle du château, construite un peu en dessous, mais rattachée jadis à son enceinte par des fortifications, sert aujourd'hui de paroisse à Montmurat. Ses dimensions sont de 15 mètres de longueur sur 9 mètres de largeur. Son architecture est gothique. Elle est sous l'invocation de la Sainte-Vierge, et a pour fête patronale l'Assomption. Son vaisseau est trop petit pour contenir la population. Du reste, elle est bien entretenue et décorée; un antique tableau, représentant l'Ascension, orne son retable. On remarque la légèreté de sa voûte et la délicatesse des nervures du sanctuaire, dont l'une des clés présente, relevée en bosse, l'image de Marie avec l'Enfant-Jésus à son bras. Cette église possède aussi un reliquaire simple et élégant qui renferme un cheveu de la Sainte-Vierge, et quelques reliques de saint Biaise et de saint Arthémon, martyrs; elle avait jadis titre de prieuré.

Pierre Fabre en était recteur en 1540; N. de Barriac, en 1706; Guillaume Daudé, en 174S; il portait le titre de prieur; Antoine Ginalhac, en 1768.

Du presbytère, l'habitation la plus élevée, on jouit d'une vue magnifique. Un tapis de verdure se développe à vos pieds; plus loin, des bouquets d'arbres; l'on découvre enfin le Lot à la vaste nappe d'argent, ralentissant son cours et s'endormant mollement pour s'éloigner le plus tard possible de ces rives aimées.

L'ancien château féodal était sur le rocher qui domine le bourg. C'est à tort que quelques écrivains ont avancé qu'il avait appartenu aux d'Armagnac ; ils en étaient seulement les suzerains, comme le furent constamment tous les vicomtes de Carlat. Cette seigneurie appartenait, dès le XI° siècle, à des seigneurs du nom de Montmurat. Ils sont mentionnés parmi les protecteurs de l'abbaye de Figeac, dans une bulle du pape Urbain II, datée de Limoges, en janvier 1095.

Il y avait déjà, en 1268, deux habitations féodales, le château-haut et le château-bas. Le château supérieur était passé de la maison de son nom, en 1278, dans celle de Lentilbac, qui avait épousé la fille de Pescher de Montmurat.

Le château inférieur appartenait à la famille de Panal. Sibylle de Panat, en 1268, veuve d'Armand de Barasc, en fit don à Aigline de Barasc, sa fille unique, mariée à Guibert de Felzins, et leurs descendants devinrent, par la suite, seuls possesseurs de la seigneurie de Montmurat, soit par des acquisitions successives, soit en vertu d'échanges faits, en 1291, avec les héritiers de Bertrand de Lentilhac.

Vénérable Aldémar de Felzins , issu des seigneurs de Montmurat, franciscain au monastère de Figeac, vivait dans une haute piété. Il eut le don des miracles; il ressuscita le fils de N., dame d'Aurillac. Aldémar resta dans ce monastère jusqu'à la fin de sa vie.

Guillaume de Felzins, seigneur de Darse, était aussi seigneur de Montmurat en 1302.

Pierre de Felzins fit, en 1492, son héritière Antonia, sa nièce, qui avait épousé Reynaud de Roffiniac; et quoiqu'elle en eût un fils, l'on voit que Montmurat ,avait passé à Pons de Felzins, son parent. Pons vivait en 1511.

Balthazar de Felzins, en 1560, était un des 100 gentilshommes de la chambre du roi ; il fut gouverneur de la ville de Maurs pendant les troubles d'Auvergne.

Jean de Felzins fut commandeur de Carlat en 1536. Hélène de Rilhac, veuve de Christophe de Velzins, se remaria, en 1641 , avec Gaston de Naucase. ; elle se constitua une dot de 20,000 livres, et fit enlever tous les meubles du château de Montmurat.

Jean de Felzins, baron de Montmurat, n'eut qu'une fille nommée Hélène, qui épousa, en 1657, Louis de Turenne, seigneur* d'Aynac, et lui porta la terre de Montmurat.

Jean-Paul de Turenne, marquis d'Aynac, prit possession de Montmurat en 1697, après la mort de son père; il n'eut qu'une fille, Marie-Paule de Turenne, qui porta Montmurat, par son mariage, à François d'Arzac, capitaine de cavalerie. Son fils Charles, baron de Montmurat, était, en 1789, officier au régiment du Languedoc.

En 1288, le seigneur de Montmurat ayant eu des démêlés concernant la dépendance du château envers le bailliage des montagnes d'Auvergne, le roi nomma Géraud Moyssetie juge dans cette discussion.

Nous avons reçu de M. Arnal, ancien maire de cette commune, un mémoire sur elle, dont nous allons extraire les faits suivants.

L'auteur expose d'abord qu'il estime que le nom de Montmurat provient de ses anciennes fortifications; il exprimerait mont muré.

Cet antique château , dont l'origine se perd dans la nuit des âges , était situé sur un pic élevé; ses remparts, dans quelques parties, étaient taillés dans le.roc; il occupait une superficie d'un demi-hectare; il se composait de treize tours, dont neuf étaient d'une masse énorme et d'une grande élévation- Son enceinte dominait tout le pays. L'épaisseur de ses murailles était de deux mètres et quelquefois plus. Aussi, dans les temps où l'artillerie était inconnue, c'était une forteresse imprenable. Dans son enceinte, était une place d'armes nommée la Garenne, entourée aussi de murs et de fortes tranchées faites dans le roc. C'était le lieu des rassemblements de la garnison, et celui où elle était exercée.

Dans la cour du château, existe encore un puits de 34 mètres de profondeur, qui fournit abondamment une eau excellente; il est constamment taillé dans le roc, ouvrage qui éblouit l'imagination lorsque l'on songe que ceux qui l'ont exécuté étaient privés du puissant moyen de la poudre. Un souterrain serpentait dans le cœur du rocher.

Dans la Garenne de Montmurat est une caverne spacieuse, assez longue, creusée au versant nord, sous une couche calcaire; elle est connue dans le pays sous le nom de la Cave des Anglais. La tradition n'a conservé aucun fait relatif à l'origine de ce nom.

La découverte d'une autre caverne renfermant des ossements eut lieu en 1840, sur le milieu du plateau de la Garenne. Dix crânes constataient que cette grotté avait renfermé dix individus. L'inspection des ossements démontrait que ces infortunés avaient dû y être déposés vivants. Les journaux de l'époque ayant donné une relation de cette découverte, nous allons en extraire quelques passages:

« La grotte de Montmurat a été faite par la main des hommes sous un dallage calcaire; elle est taillée avec soin; sa forme est régulière. On y pénètre, en se courbant, par une petite entrée pratiquée entre deux bancs de rochers; on ne peut passer qu'un par un ; la pente verticale, à l'entrée, est de i m. 50 c. Puis, après avoir parcouru une longueur de 25 mèt, très-proprement taillée, sur une hauteur de 1 m. 85 c. et une largeur de 2 m. 25 c., on pénètre dans le fond de la caverne, qui était spacieux. A l'entrée, on trouvait, sur une longueur de A mètres, des débris calcaires entassés sans aucune précaution. La porte delà grotte avait été murée avec soin.

Cette grotte fut découverte par hasard en creusant une carrière. Derrière son entrée, et sur les débris calcaires, furent découverts les ossements entassés vers l'ouverture. Le pêle-mêle de ces ossements se touchant, se croisant l'un dans l'autre, démontrait à l'évidence que les corps n'avaient point été symétriquement déposés; au contraire, on voyait à l'inspection qu'ils s'étaient consumés assis ou accroupis sur eux-mêmes. La tête, loin d'être dans sa position normale, gisait vers le centre des débris de chaque individu. Ils devaient être dans la force de l'âge; aucune dent ne manquait a leur mâchoire; et, comme ces os s'étaient fortement pétrifiés, la fin de ces misérables devait remonter à une haute antiquité.

Le château avait aussi des oubliettes. Un cachot profondément creusé dans le roc, au milieu des ténèbres , et d'où aucune voix humaine ne pouvait être entendue, se trouvait sous le château; on ne pouvait y pénétrer que par un boyau fermé de trois portes, dont l'une, qui existe encore dans les décombres, était en fer. A la voûte, on voit aussi un terrible crochet de fer, scellé â quatre crampons, instrument sinistre des exécutions.

Tristes réflexions à faire sur ce droit de haute justice, exercé parfois plutôt par vengeance de l'homme puissant, que pour les besoins de la société.

Il existait encore dans le château d'autres cachots, mais moins sévères, uu peu dans le genre de nos cabanons cellulaires. Le grand cachot noir, disait dans une réunion l'un des derniers propriétaires du manoir féodal, était destine aux grands criminels. On ne doit pas oublier que la justice des seigneurs remplaçait alors notre justice criminelle, plus la barbarie du temps.

En 1821 ce château existait presque en son entier; mais beaucoup de «es parties étaient en ruines. Il fut cette année-là divisé, ainsi que les terres, en plusieurs lots, et vendu aux enchères par l'ancien propriétaire. Depuis cette époque, plusieurs des tours ont été démolies. Elles avaient été découronnées précédemment, en 1793, et leurs créneaux arrachés de leur cime. Une maison moderne a remplacé le donjon féodal.

On découvrit aussi, en 1803, une autre grotte sépulcrale, sur un monticule inculte nommé Puech de Rosiers. Sa planimétrie est assez vaste et très-bien appropriée à une rencontre. Le cultivateur en labourant y rencontre parfois des pointes de javelots, des traits brisés. Cette grotte a aussi été creusée de main d'homme sous un dallage calcaire de grande dimension. Là se trouvèrent un grand nombre de squelettes humains parfaitement conservés et entièrement pétrifiés. Ou y trouva plusieurs vases de terre cuite, des monnaies de la grandeur d'un liard; mais le tout fut brisé, pillé par des ignorants avides, plus occupés de leur butin que de l'art.

Il a été découvert aussi quelques grottes naturelles dans le mont de Montmurat, sous son immense couche calcaire. L'une d'elles surtout était remarquable par ses stalactites aux formes bizarres et variées. Une main vénale et sacrilège, il y a peu d'années, a dépouillé ces voûtes de leurs cristallisations, et leurs débris ont été vendus à une usine du voisinage.

Enfin, dans les environs de Montmurat on trouve fréquemment des ossements humains, témoins muets de collisions armées, dont le souvenir n'est point parvenu jusqu'à nous; ils sont ordinairement rangés par quatre et cinq individus.

Les débris de poteries romaines, des monnaies recueillies en ces lieux, attestent l'occupation de cette terre par les satellites du peuple-roi. Rien ne s'oppose, au reste, à ce que les Romains aient- eu dans ces lieux une de leurs stations (mensionnes). Mais nous ne considérons que comme signe de leur haute domination les noms de Puech de Mercuriol et de Puech de Jou donnés à deux monticules de cette commune. Nous avons dit à l'article Religion (7' livraison, page 166 et suivantes), ce que nous avons cru recueillir de vrai sur leur théogonie. Mais comme il est de fait que Mercure, Jupiter et autres dieux étaient adorés par les Arvernes, qui les avaient reçus des colonies grecques, nous ne pouvons retrouver dans leur culte un signe de l'omnipotence romaine.

Sur une petite éminence nommée la Chapellenie, on a trouvé, de nos jours, des monnaies d'argent et de cuivre. En 1804, un cultivateur rencontra une petite pièce d'or à l'effigie de Vitellius; il la vendit 12 liv. à un amateur.

En général, les eaux de Montmurat sont excellentes et très-saines pour la boisson. On y remarque une forte source jaillissante sortant à mi-coteau, appelée Fon'/an. On lui attribue la qualité de guérir du goitre, et de plus, les personnes qui en sont atteintes en obtiennent la guérison au bout de cinq à six mois. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il n'en existe pas dans la commune.

L'eau de cette source réunie à celle de St-Santin, forme un ruisseau dans lequel on pèche beaucoup d'anguilles. Au-dessous du moulin nommé de Ratier, sur une longueur d'une lieue, on trouve un très-grand nombre d'huîtres d'eau douce; mais on ne trouve aucun de ces coquillages dans les bancs calcaires.

Le mont sur lequel repose le bourg de Montmurat est élevé au-dessus de la plaine d'environ 150 mètres. La pente de ses flancs est rapide de tous côtés. Sur le sommet existe un plateau oblong, qui a environ 300 mètres de long sur une largeur moyenne de 60 mètres. Le sommet est boisé. L'on y trouve du chêne, du frêne, du charme. Le buis y croît abondamment, ainsi qu'un grand nombre de plantes propres à la médecine.

Au-dessous des roches grossières qui se voient à la surface, se trouvent des bancs d'un calcaire très-blanc, facile à tailler ; ils servent aux constructions. Les cavités nombreuses de ces bancs servent d'asile à de nombreux lapins, qui y trouvent des retraites assurées.

Trois monticules appelés : l'un, le Puech-de-Roziers, déjà mentionné; le deuxième, Puech-de-Gratacap, et le troisième, la Garenne-de-St-Santin, constituent, avec deux vallons profonds qui sont intermédiaires et quelques terrains qui se sont détachés de leurs versants, tout le bassin calcaire du pays. Il est très distant de tous les autres gisements de cette nature, assez circonscrit, et l'on en ferait le tour facilement sur une circonférence de 11 kilom. dans l'espace de deux heures.

Le touriste qui, dans la belle saison, vient recueillir les émotions de la belle nature, trouvera sur la Garenne de Montmurat un immense et magnifique panorama. A l'est, il a pour horizon la chaîne cyclopéenne du Cantal, les montagnes des Viadènes et d'Aubrac, vue grandiose, perspective sévère.

Au nord, sa perspective s'étend depuis le pic de Samberson, près de Lacapelle-Marival, jusqu'aux montagnes de Salers, sur une vaste étendue de terrain couvert de belles châtaigneraies, et se reposant enfin sur la plaine de Maurs, les environs de St-Constant et la riante vallée de Banhac, sur le Celé.

A l'occident, on aperçoit les sites des environs de Figeac et de Capdenac, remplis de vignobles, et, dans le lointain, les coteaux qui avoisinent Cahors.

Enfin, en se tournant vers le sud, on a devant soi les terrains accidentés de la partie nord du département de l'Aveyron, et l'on pénètre presque jusqu'aux portes de Rodez. Plus rapprochés de soi, on découvre les bassins houillers d'Aubin et de Decazeville, avec leurs fourneaux à cheminées volcaniques, image encore vivante des révolutions ignées de ces parties de nos montagnes, et l'œil attristé se repose avec délice sur les riantes plaines de Livinhac, nommées à juste titre le Jardin de l'Aveyron. La rivière du Lot, limite du Cantal, déploie au milieu de ces plaines son ruban d'argent, aux contours ondulés et majestueux.

Les villages et hameaux de cette commune sont:

Alfaric, village au sud du bourg, sur la limite du département.

Amblardie (l'), village.

3° Assier-Bas, hameau.

Assier- Haut, hameau.

Bonis, village au nord du bourg.

Bos-Bas, hameau.

Bos-llaut, hameau.

Bos-Vert, hameau.

Chapellerie, hameau. Son nom indiquerait qu'il a dû y exister une chapelle. 10° Claux, hameau.

11° Garde (la), hameau.

12° Gondendy, hameau.
13° Laval, village sur la limite, à l'ouest.
14° Migon, hameau.
15° Mollerie (la), village.
16° Moulin-liatier (le), hameau.
17° Prieuret, village.
18° Puech-de-Roziers, hameau.
19° Ratier, hameau.
20° Roziers, village au nord de Montmurat.

21° Salliéges, village.

22° Sarrade, hameau.

23° Vaissière (la), hameau.

24° Valettie (la), hameau.

25° Venat (le), hameau.

Le sol de cette commune est, comme nous l'avons dit, généralement calcaire; on y trouve le calcaire coquillier dont on fait de la chaux. Les terres labourables sont d'assez bonne nature et produisent du froment, du maïs, des haricots, du sarrasin et beaucoup de fruits. Sous une température presque méridionale, le sol donne les produits les plus variés. Au milieu des vignes qui occupent la partie la plus élevée du coteau en dessous des maisons, on remarque des pêchers, des figuiers, des châtaigniers, etc. Le vin est d'une faible qualité, léger, et se consomme dans le pays.

Indépendamment des fours à chaux, le calcaire que l'on extrait dans la commune tient lieu de castine dans les fonderies de Decazeville, qui en font une grande consommation.

La nomination de la cure de Montmurat était à la collation de l'évêque.

Cette commune fut comprise pour une somme de 1,350 livres dans la réparation de l'impôt de l'élection d'Aurillac de l'année 1696.

Montmurat était de droit écrit, relevant d'Aurillac.

P. de C.

 

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