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Drugeac

— La commune de Drugeac est comprise dans le canton de Mauriac. Elle est limitée au nord par le ruisseau de Rives ou de Calcal, qui la sépare de la commune de Salins; au sud, par celles de Ste-Eulalie et de St-Martin-Valmeroux; à l'est, par celles de St-Bonnet et d'Anglards, et à l'ouest, par la Siorme, qui la limite en partie du côté de Drignac.

La surface de son territoire est de 2,300 hectares, dont 1,000 h. en terres labourables de bonne qualité; 900 h. en prés et pacages; 100 h. en bois de diverses natures, et 150 h. en terres vaines, rochers et bruyères

Elle est arrosée par la rivière de Siorme; les ruisseaux de Calcal, de la Canne, de Brouzottes, de Fageole, etc.

La population est de 1,317 habitants, répartis dans 12 villages, 2 hameaux et 217 maisons.

Drugeac, chef-lieu, à 14 kilomètres de Mauriac, est un joli bourg situé sur la route impériale n° 122, qui parcourt la commune du nord au sud; il est à l'abri des vents du nord. On y voit quelques jolies maisons dont quelques-unes servent d'auberges.

La construction de l'église remonte à une époque fort reculée. Elle est dédiée à saint Géraud, et elle en possède des reliques. Suivant la charte de Clovis, elle était sous l'invocation de saint Pierre et de saint Saturnin. Il y est dit: « Inter flumina Siore et Aurac villa Drugiac est ecclesia sancto Petro indominicata et sancto Saturnio dicata, coloniœ 3. Ibidem manent servi Arboandus , Riculphus, Tolberto Aurilla solvunt annon. mod. 4, avenœ 2 , solidos 5. »

Cette église, dont l'architecture est gothique, était un prieuré dépendant de l'abbaye d'Aurillac et qui fut ensuite concédé aux jésuites. Dans le cimetière se trouve une croix remarquable par son ornementation. Deux lions ou sphinx lui servent de support, et un bouc est sculpté sur le devant.

Pierre Moysset est le plus ancien prieur connu. Le Sr de St-Martial le choisit pour un arbitrage, en 1271. Armand Vaisse fut prieur en 1326. Gilbert de Veyrac, en 1358. Jean de Réchaptor, en 1387. N. Jean de St-Martial, en 1401. Jean de la Salle, en 1442. Guillaume de Touchebœuf, dit de Beaumont, en 1446. Jean de Lafarge, prieur et seigneur temporel du Drugeac, en 1505. Antoine de St-Martial, en 1554. Cette seigneurie temporelle consistait en rentes et dîmes sur le chef-lieu et quelques villages. Sébastien Gras fut curé en 1662. Melchior de Polignac, en 1682. Philippe de St-Martial, en 1683. Louis de Frétai de Boissieux en 1691. Antoine Ligaud, en 1697. Guillaume Broussat, en 1703. N. Sudran, en 1762. Chabaud, en 1772.

Drugeac était autrefois une riche baronnie qui a appartenu longtemps à la famille de St-Martial, originaire du Limousin. Elle dut être possédée auparavant parla famille de Jou; car elle fut portée en mariage par Yolande de Jou, dame de Cologne et de Drugeac, vers 1400, à Pierre de St-Martial. N'ayant pas eu d'enfants de leur mariage, il laissa sa succession a Jacques de Plaigne, son neveu, par son testament du 28 mars 1423, a condition de prendre le nom et les armes de St-Martial. Jacques devint ainsi seigneur de Drugeac. Cette famille de St-Martial de Plaigne conserva la baronnie de Drugeac jusqu'en I660, époque où elle se fondit dans la maison de Lur-Saluces, par le mariage de Françoise de St-Martial avec Henri de Saluces, le 1er mai 1666.

La baronnie de Drugeac appartint à ces derniers jusque vers 1815. Alexandre de Lur-Saluces, gouverneur de Salers, épousa dans cette ville, dans un age très-avancé, vers 1810, N. Lespinasse, et mourut sans postérité. Sa veuve, qu'il avait fait son héritière, se remaria en 1817 avec le baron Locard, alors Préfet du Cantal. Ils n'eurent qu'une fille, Sophie Locard, héritière de Drugeac, mariée avant 1847 au comte de Quinemont, propriétaire actuel de cette terre, et qui réside en Touraine.

Voir le Nobiliaire d'Auvergne sur les hommes marquants de ces familles.

Audigier dit, en parlant de Drugeac, que ce lieu est du ressort d'Aurillac et de Salers ; que la famille de St-Martial, qui l'a possédé longtemps, est une des plus illustres par ses grandes alliances, et que Geoffroy de St-Martial vivait eu 1169.

Il ne reste plus que quelques ruines du beau château de Drugeac. Il fut incendié par accident quelques années avant la révolution de 1789. Une partie était déjà en ruines en 1753. Suivant la description que l'on a conservée, il se composait alors de quatre grands corps de logis flanqués aux quatre coins de quatre tours rondes. Au centre de l'une des façades était une tour en forme de carré long, munie de meurtrières, créneaux et mâchicoulis en usage dans les XII° et XIII° siècles. Quatre étages étaient superposés l'un sur l'autre, et l'on y parvenait par un escalier extérieur. Les toits étaient couverts en tuiles rouges.

La porte principale du château était à l'aspect du couchant, à plein cintre. Deux petites tours en pierres de taille la défendaient. Il fallait parcourir un long corridor voûté pour arriver à la cour du château. Les salles, les cuisines, les offices, tous les appartements du rez-de-chaussée, les grandes et petites écuries étaient voûtés. Outre les salles indispensables pour une aussi vaste habitation, les deux étages des corps de logis renfermaient un grand nombre d'appartements.

Il y avait dans le château une belle fontaine. Une vaste terrasse, à l'aspect du midi, offrait une agréable promenade. De larges et profonds fossés et de forts murs d'enceinte mettaient le château à l'abri de toute surprise et de toute attaque.

Aujourd'hui une petite maison est élevée sur les ruines de l'ancien manoir féodal; elle sert de pied à terre au propriétaire étranger à l'Auvergne qui a succédé aux antiques barons; elle sert encore à ses fondés de pouvoirs, lorsqu'ils viennent surveiller la culture des fermiers et percevoir les revenus de cette terre.

Il y avait anciennement, dans les cours, des allées plantées ; d'antiques tilleuls épars ça et là indiquent leur existence, et celle des berceaux qu'ils formaient. De belles prairies se développent au midi, et se prolongent jusqu'à la rivière.

Les villages et hameaux de cette commune sont:

Aucher, village sur un plateau qui domine la vallée de Drignac.

Champs, village à l'est du bourg.

Custrac, village au midi du chef-lieu et sur la route impériale. Géraud et Albon de Fontanges, chevaliers, habitaient ce village en 1555, ainsi que Bernard de Custrac; ils firent un traité avec Etienne de Scorailles et noble Savaric de Salers.

Fageole, village à l'est et assez loin du chef-lieu. Il est mentionné dans la charte de Clovis de la manière suivante : In villa Faiolœ coloniœ 3, manent servi Badinus, Robertus, Audulphus, solvunt annon mod. 3, vaccam pinguam i, solidos 3.

Freluc ou Ferluc, l'un et l'autre sont employés indistinctement dans les anciens titres (frigido loco , est un petit château existant encore. Il est au nord de Drugeac, et avait donné son nom à une famille éteinte vers le milieu du XV° siècle.

D'après un hommage rendu au roi en 1684, le siége de cette seigneurie était dans un château composé d'une tour carrée et d'un corps de logis. L'état des lieux est aujourd'hui le même, car en 1847 tout ce qui menaçait ruine a été consolidé ou reconstruit sur l'ancien plan ; mais le corps de logis principal a été recouvert en ardoises. Le côté nord du château, placé sur une élévation à pic, domine une vallée fertile et riche en herbage. On l'aperçoit de loin en venant de Mauriac. Un bois épais d'arbres séculaires existait auprès, il y a quelques années; un coteau de verdure l'a remplacé.

Le château avait droit de guet et de garde; la reconnaissance en fut renouvelée en 1413.

Fieluc avait une châtellenie : une reconnaissance de l'affare de Freluc, de 1612 porte que les censitaires se soumettent à sa juridiction ordinaire. Un acte extrajudiciaire de 1770, émanant de son juge, en confirme l'existence.

En 1304, Pierre et Jean la Porte firent aveu et dénombrement à Raymond de Freluc, pour les biens qu'ils tenaient de lui ou de ses ancêtres. En 1326, Huguette de Rosso donna à Sybillo, sa sœur, dame de Freluc, tous ses biens et droits, sauf une réserve de 100 liv. tournois, une robe valant 100 sols et la moitié d'un lit garni, de valeur convenable. En 1339, Sybille, femme de Géraud de Freluc, fit don de la moitié de ses biens, par préciput et hors part, à Ebles, son fils.

Raymond de Freluc n'eut qu'une fille de Catherine d'Orignac ou d'Ornac; étant devenue veuve, elle fonda dans l'église de Drugeac une chapelle sous le vocable de sainte Catherine, la donna par testament au seigneur de Saint-Chamand, à ses héritiers, à leur défaut au prieur de Drugeac, et le prieur défaillant à l'abbé d'Aurillac.

En 1420, cette terre et seigneurie passa, par le testament de Guérines de Freluc, fille de Raymond et de Catherine d'Ornac, dans la famille de St-Chamand. Plusieurs extraits des actes de la seigneurie furent délivrés, en 1322, à Jean de St-Chamand.

Un acte de vente de 1536, consenti par Jean de St-Chamand, transmit la propriété de Freluc à Loy de l'Estrange, et l'année suivante, Loy donna en échange à Jean certains droits qu'il possédait sur la seigneurie de St-Chamand, en Limousin. Freluc resta peu de temps en possession du nouveau propriétaire: en 1540, Loy la revendit à honorable homme Berangon de Chalvet de Bochemonteix. Cette vente est ordonnancée par Pierre Comolet, juge et garde-scel au bailliage des montagnes d'Auvergne. La chapelle de S"-Catherine était comprise dans cette vente; elle fut encore mentionnée dans une autre vente de 1703. Il paraît que le service de cette chapelle était une cause de mésintelligence entre le seigneur de Freluc et le prieur de Drugeac, car il intervint, en 1531, une transaction entre le prieur et Berangon de Chalvet. Cette transaction n'avait pas terminé le différend en totalité; car quelques mois après, le bailli d'Aurillac rendit une sentence contre frère Antoine de St-Martial, camérier du monastère de St-Géraud, prieur de Drugeac, pour avoir élevé un gibet à Freluc, en signe de droit de justice. Enfin, il intervint, en 1554, une transaction qui mit fin à cette affaire.

La baronnie de Freluc passa par mariage, vers 1570, à Jacques de Faye d'Espesse, président à mortier au Parlement de Paris.

Henri d'Espesse, son fils, eut un procès avec les consuls et les collateurs de la paroisse de Drugeac, qui avaient imposé d'office la taille sur le domaine de Freluc. Un arrêt de la Cour des aides de Clermont-Ferrand, d'août 1686, dispensa le seigneur d'Espesse de cet impôt. Cette sentence fut motivée sur ce que ce seigneur faisait valoir lui-même son domaine; et en conséquence, dit l'arrêt, fait défense aux intimés et à leurs successeurs de continuer la taille tant et si longtemps que l'opposant fera valoir ledit domaine à sa main, par valets et domestiques, et ne dérogera pas à la noblesse.

Henri n'ayant eu que des filles, mortes en bas âge, donna la seigneurie de Freluc en jouissance à Pierre Audraud de Langeron, prieur de St-Pierre. Arnoul Garnier, lieutenant de vaisseau de la marine du roi, devint seigneur de Freluc comme héritier de Bonne de Faye d'Espesse, sa mère, mariée en secondes noces avec Arnoul Garnier, seigneur de Salins, lieutenant de la vénerie de Monsieur, duc d'Orléans.

En 1703, cette terre fut vendue par Arnoul Garnier à demoiselle Anne Rodde, veuve Valette de Salers, qui maria sa fille avec Charles-Henri Pons, Sr de Lachaud, avocat au Parlement. Jean-Joseph Pons, son fils, habitait le château de Freluc, et ajouta à son nom patronimique celui de cette seigneurie.

Freluc appartient aujourd'hui à M. Benoid, originaire de la ville d'Allanche, juge au tribunal de Gannat, dont la mère, Mlle Pons, était la dernière héritière de cette branche, son frère n'ayant pas eu d'enfants. Par donation entre vifs du 14 septembre 1849, Annet Pons de Freluc, oncle de M. Benoid, lui remit l'habitation. Précédemment, en décembre 1847, une ordonnance royale avait autorisé l'adjonction du nom de Pons à celui de Benoid.

Ainsi se trouve rectifiée l'inexactitude de ce qui a été dit sur M. Benoid, à l’article Allanche.

Le petit village de Freluc n'a pas augmenté depuis 1644, ce qui est constaté par un partage des eaux d'irrigation fait a cette époque entre tous les habitants. En suivant la rue principale, on arrive à une fontaine publique dont les eaux deviennent blanchâtres à la moindre pluie. De là on arrive à un couderc (communal) appelé del Telhiol, à cause d'un tilleul qui s'y trouve. Cet arbre est un Sully magnifique, encore plein de vigueur et dont les fortes branches, supportées par un énorme tronc, projettent au loin leur ombrage.

Frugère-Haut et Bas, village à l'ouest et dans le vallon de Drugeac. Il est aussi indiqué dans l'ancienne charte ainsi qu'il suit : « In villa Fargeyres coloniœ 3, manent servi Berardus, Fulcorinus, Theodeberta ancilla; solvunt annon mod. 3, avenœ, mod. 1, solidos 3. »

Moulin-de-Drugeac, hameau près du pont et de la route impériale.

Moulin-d'Henri, hameau.

Parieu. Les rentes de Parieu, auparavant prélevées par le baron de Drugeacr avant été acquises de seconde main par M. Vacher de Tournemire, de Mauriac, celui-ci se transporta sur les lieux au mois de mai 1770 pour y exercer son droit; les femmes de Parieu s'ameutèrent, chassèrent le nouveau seigneur, le poursuivirent avec injures et à coups de pierres, ce qui donna lieu à une plainte et à l'arrestation des récalcitrantes. Malheureusement pour le plaignant, Marie Rongier, qui n'avait pris aucune part à la rébellion, fut, en même temps que les autres, abusivement arrêtée, liée, garrottée, traînée en prison au son bruyant de la musette et ainsi donnée en spectacle de village en village jusqu'à Aurillac ; elle se pourvut d'abord devant le bailliage d'Aurillac qui, par sentence du 7 juillet 1770, ordonna sa mise en liberté. Non contente de cette première satisfaction, Marguerite Rongier se rendit appelante au Parlement, prenant à partie M. de Tournemire, le substitut du procureur général d'Aurillac et l'huissier capteur. L'affaire était encore pendante devant le Parlement, en 1774. (Mémoire imprimé.)

10° Soulage, village dans le vallon, sur la Siorme. Il était, il y a peu d'années, la résidence d'un rameau de la famille de Tournemire. Il est aussi indiqué dans la charte: « In villa Solatgue coloniœ 2, manent servi Guilbertus, Engelardus; solvunt annon mod. 2, avenœ mod. i, solidos 2. »

11° Le Teil, village situé sur la plaine qui domine Drugeac, au levant, aussi indiqué dans la charte du Clovis : « In vilta Teils coloniœ 2, manent servi Maslardus, Utnardus; solvunt annon mod. 2, fresingas 2, denarios 15. »

12° Veillères, entre deux ruisseaux et à mi-coteau, presque au midi du chef-lieu. Veillères était habité, en 1417, par Hugues de Ribier, de la maison de Plagne.

13° Vernet, village sur la route impériale, au nord du bourg.

Les terres ensemencées sont de bonne qualité, en général légèrement argileuses et calcaires. Les prairies et pacages sont bons et bien arrosés; le sol est généralement schisteux et couvert de masses de basaltes.

 

P.deC.

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