Quand les vielles et cabrettes, sur le podium ombré, Pour les groupes folklo, entonnent la bourrée, Sous l’œil émerveillé de l’estivant badaud, Le public extasié remercie de bravos. Dès la danse finie saluent les pastourelles Aux fins sabots de bois, aux coiffes de dentelles, Babarels empesés sous le foulard de soie, Chacun avec émoi se souvient d’autrefois. Et pourtant nos mémés, les Catie, les Nounel, Ces femmes de chez nous ne portaient point dentelle, Ni seyants cotillons, ni falbalas soyeux, Elles avaient peu de temps pour les rires et les jeux. De l’aurore à la nuit, les Marion, les Lénou, Aux champs, à la maison, on les voyait partout, Toujours vêtues de noir, le chapeau arrimé Par l’aiguille à tricot au chignon bien coiffé ; Ni le temps ni l’argent pour penser aux toilettes, Dans leurs simples atours elles restaient coquettes, Jeunes bergères hier en gardant le troupeau, Avec leur frais minois sans riches oripeaux, Si sages et si jolies, aux lèves un frais sourire, Les solides bouviers elles savaient séduire. Les Fantou, les Marti à leurs pièges sont pris ; La cabrette bientôt les mène à la mairie. Les mémés de chez nous ne portaient point dentelle Mais pour nos grand pépés, mon dieu qu’elles étaient belles. Ces faiseurs de galas de fêtes touristiques Donnent de la bourrée un aspect idyllique. Aujourd’hui la bourrée bien remise en valeur, Nos anciens la dansaient sans beaucoup de ferveur ; Ils préféraient, c’est sûr, même avec le poutou, Enlacer dans leurs bras pour un fringuant taïtou Les Janou, les Lisou qui tournaient avec joie Ces danses endiablées la gigue et la polka. Les filles de chez nous dansaient peu la bourrée ; Auprès d’un cavalier c’est bon de se serrer, C’est ainsi qu’autrefois, après le dur labeur, S’amusaient dans la joie, le calme et le bonheur Les Marti, les Guiral, les Féli, les Toinou Et les belles Lisou, Lénou ou Catinou.
Jean-baptiste Manhes
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