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Réparer une injustice et réhabiliter le frêne pour ce qu'il est, tel était sans doute le but de Jean-Baptiste Manhès lorsqu'il a écrit le poème ci-dessous, le frêne. Nous vous laissons le découvrir par vous-mêmes.

 freneFrenaie

Le frêne

Des chênes et peupliers on a chanté la voix,
Sous l’ombre de l’ormeau jadis jugeait un roi,
Le poète a décrit du sapin la crinière,
Mais le frêne des prés est laissé en arrière.
Au milieu de la haie dressé droit comme un i,
S’il n‘est majestueux, le frêne est bien joli,
Soit en alignement le long des chemins creux
Ou seul droit vers le ciel au coin du pré herbeux.
L’été son habit vert abrite les oiseaux ;
Sous la mousse du pied larves et vermisseaux
Régalent leurs becs fins, un vrai festin de roi.
Quand s’égrène midi au communal beffroi,
A la saison des foins, le faucheur en sueur
A sa branche suspend son outil de labeur,
Ses forces réparées par un frugal repas,
Sous son ombrage frais il se reposera.
Si après l’été chaud est rare le regain,
Ses branches émondées apaiseront la faim
Du troupeau de Salers qui sans cesse rumine
Sous les yeux du berger qui, au couteau, dessine
Dans sa branche tombée un serpent enroulé ;
Quelle fierté pour lui de l’avoir ciselé!
Pendant le long hiver, le paysan bricoleur,
Dans son tronc débité, met ses dons en valeur,
Pour créer un outil campagnard et costaud :
Soit un manche de faux ou rustique râteau.
Et même autrefois ignorant hickory,
C’est dans son pied trempé qu’on fit les premiers skis.
Depuis la nuit des temps, pour remplir son carquois,
Le malin Cupidon utilise son bois.
Comme rien ne se perd, du sol déracinée,
La souche, pour Noël, est dans la cheminée,
Réchauffant la maison et les sabots de bois
Que l’enfant au réveil videra avec joie.
Sur pied ou abattu, le frêne méconnu
Aux paysans auvergnats des services a rendus.


Jean Baptiste Manhes

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